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ÉDUCATION
25
November 2025

Apprentissage : les écoles du supérieur face à l’incertitude sur l’avenir

Entre nouveaux décrets, contexte économique et politique instable et projet de loi de finances 2026, l’apprentissage dans l’enseignement supérieur semble atteindre un point de bascule. Après plusieurs années de croissance soutenue, les écoles de statuts variés partagent leurs constats sur leur campagne de recrutement d’apprentis et sur leurs stratégies, tout en exprimant leurs attentes vis-à-vis des pouvoirs publics.

Les effets des réformes sur le recrutement des apprentis

En cette fin d’année 2025, les écoles analysent les impacts du décret du 27 juin, qui instaure une contribution de 750 euros pour les employeurs accueillant des apprentis de niveaux 6 et 7 et proratisant les NPEC selon la durée du contrat. De plus, depuis le 1er novembre, les aides aux employeurs pour les contrats de moins d’un an sont également proratisées, comme le précise un décret du 31 octobre.

Quels impacts depuis la rentrée ?

Tous s’accordent sur un constat : la période faste de l’apprentissage est derrière nous. Il reste difficile de distinguer ce qui relève des mesures récentes et ce qui découle du contexte économique et politique global, souligne Anne-Sophie Courtier, directrice générale de l’EM Normandie. Après une montée en puissance notable depuis cinq ans, l’école aborde désormais l’apprentissage avec prudence face aux régulations changeantes.

Prudence et perspectives de baisses de contrats

Selon Anne-Sophie Courtier, le décret du 27 juin a provoqué un pic de signatures avant son entrée en vigueur le 1er juillet, notamment chez les PME déjà engagées dans l’apprentissage. Mais la suite est plus complexe : certaines entreprises réduisent leurs offres et prolongent leurs délais de réponse, tout en négociant le reste à charge avec des contreparties financières. Résultat : certains étudiants admis en cycle master ont renoncé faute de contrat, touchant des formations comme la finance, la supply chain ou le marketing RH.

Isabelle Huault, directrice générale de l’EM Lyon, insiste également sur la prudence : « Cette année, les entreprises ont accepté de payer le reste à charge et la demande reste forte, mais nous anticipons une évolution l’an prochain. » À Skema BS, même si l’impact direct semble limité cette année, la DG Alice Guilhon estime qu’il se fera sentir sur le nombre d’entreprises souhaitant accueillir des apprentis. À Kedge BS, la signature des 3 000 contrats d’apprentissage a été plus difficile, avec moins d’offres disponibles et des négociations plus longues.

Une question de marque ?

Selon la CDEFM, 71 % des écoles interrogées n’observent pas de baisse des inscriptions, mais 79 % constatent un allongement de la recherche de contrat, 86 % une baisse de l’offre et 79 % des négociations plus compliquées. Les perspectives pour les prochaines années restent partagées : 14 % envisagent une hausse, 36 % une réduction et 50 % un statu quo. Antoine Prodo, président de 3E, estime la baisse potentielle des recrutements à 10 %, mettant en lumière un effet de ciseau entre diminution des aides et contribution des 750 euros. Philippe Grassaud (Eduservices) décrit un marché tendu où les entreprises sélectionnent des profils expérimentés, laissant les candidats plus fragiles sur le carreau. Thomas Jeanjean (CCIR Paris Île-de-France) note que les écoles à forte notoriété résistent mieux, tandis que les marques moins connues rencontrent de grandes difficultés pour placer leurs apprentis.

Réduire la voilure… ou pas

Certaines écoles envisagent de limiter l’exposition à l’alternance, d’autres de maintenir ou développer les effectifs.

Moins s’exposer à l’alternance

Isabelle Huault (EM Lyon) confirme que la croissance des apprentis ne sera pas anticipée, entraînant mécaniquement une baisse des ressources issues de l’alternance, environ 10 % du budget. Alice Guilhon (Skema BS) prévoit de stabiliser les effectifs à bac+5, tandis que l’impact sur bac+3 et bac+4 serait moindre, en lien avec les métiers en tension. Kedge BS réduit ses apprentis de 3 000 à 2 000, compensant par des étudiants internationaux et le développement de programmes en master et international BBA. EM Normandie vise à passer de 40 % à 25 % des effectifs en alternance pour équilibrer son modèle économique.

La clé : la demande des entreprises

D’autres écoles maintiennent leurs ambitions. William Hurst (Esdes BS) souhaite maintenir un taux d’apprentissage élevé (40 % en bachelor et PGE), soutenu par un reste à charge modéré pour les entreprises. À l’Insa Lyon, la demande des entreprises reste forte pour le modèle d’ingénieur humaniste : l’école vise 600 apprentis en 2027, contre 300 en 2023. L’Isara, où l’alternance représente 25 % des ressources et 50 % des diplômés, ne constate aucun impact des annonces gouvernementales et reste sollicitée.

les suggestions de réforme

Les écoles et leurs groupements proposent plusieurs pistes :

  • Miser sur la qualité : Dominique Restino (CCIR Paris Île-de-France) insiste sur des conditions d’apprentissage basées sur la qualité, dénonçant certaines pratiques marketing du privé lucratif qui pénalisent les jeunes. Alice Guilhon (Skema BS) plaide pour « nettoyer » le secteur pour préserver les standards d’enseignement.
  • Moduler les NPEC : Dominique Restino et Thomas Jeanjean demandent une modulation selon la qualité et les publics, pour éviter une restriction injustifiée des niveaux 6 et 7. Antoine Prodo (3E) met en garde contre une baisse qui favoriserait la dé-qualité.
  • Revenir sur les 750 euros : Philippe Grassaud et Antoine Prodo souhaitent une collecte via Opco ou Urssaf, pour éviter de pénaliser les CFA et mieux organiser le financement.
  • Préserver les aides à l’embauche : Antoine Prodo souligne leur rôle crucial pour permettre aux entreprises d’investir dans l’accueil pédagogique des jeunes.
  • Faire contribuer les étudiants non boursiers : Alexandre de Navailles (Kedge BS) propose un reste à charge pour les étudiants, afin de ne pas faire reposer le financement uniquement sur les entreprises.
  • Investir dans la jeunesse : Dominique Restino rappelle que l’apprentissage est un investissement social et économique, en vue de former ceux qui contribueront aux retraites de demain.

SOURCE : aefinfo.fr

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