Baisse démographique : comment l'enseignement supérieur anticipe la pénurie d'élèves

Alors que la baisse de la natalité affecte déjà l'enseignement primaire et secondaire, le supérieur se prépare à ce nouveau régime démographique. Universités et grandes écoles réfléchissent à l'impact de la diminution des effectifs et soignent leur attractivité par l'évolution de l'offre de formation.
Entre 2011 et 2021, le nombre d'étudiants en France a augmenté de 670.000 pour atteindre 2.937.077 à la rentrée 2022. Dans la décennie suivante, la hausse ne devrait être que de 150.000, pour culminer à 3.096.200 étudiants à la rentrée 2032.
La France et son enseignement supérieur entrent dans un "nouveau régime démographique", selon l’économiste Maxime Sbaihi. Cette baisse de la natalité devrait affecter les effectifs dès 2029, avec une diminution plus marquée à partir de 2033, écrit-il dans une note du Haut-commissariat à la stratégie et au plan publiée en septembre 2025.
"Si la proportion d'une classe d'âge obtenant le baccalauréat et poursuivant ses études dans le supérieur reste identique, les effectifs de néo-bacheliers inscrits en première année devraient baisser de 8% à horizon 2035 et de 20% d'ici 2042."
Face à ces chiffres, les acteurs de l'enseignement supérieur doivent anticiper. Vincent Bouhier, président de l'université Évry Paris-Saclay, suit le sujet depuis plusieurs années : "Il n’est pas facile à évoquer car cela touche de nombreuses dimensions : antennes de formation, maillage territorial, offre de formation et intérêt des filières."
Vers une diminution globale des effectifs étudiants
Dans ce contexte, comment remplir les bancs des amphis et TP ? Pour Jean Charroin, président de l'Essca, l’enjeu est de maintenir les effectifs prévus. "La stabilité rassure les jeunes et leurs familles. Il ne me paraît pas responsable de parier sur des augmentations d’effectifs en France."
À l'université d'Évry, certaines licences pourraient voir leur nombre d’étudiants diminuer. Mais l’objectif reste la qualité des conditions d’études : "Il ne faudrait pas profiter de la baisse des effectifs pour surcharger TP ou TD."
Pour les écoles d’ingénieurs, la double tension est de faire face à la baisse démographique tout en formant davantage d’ingénieurs. "Il faut attirer d’autres publics, notamment les jeunes filles, la féminisation des cursus étant un enjeu majeur", explique Emmanuel Duflos, président de l’EPF et de la CDEFI.
Une évolution de l'offre de formation
Pour rester attractifs, les établissements du supérieur révisent leurs offres. Les études de management, par exemple, ne se limitent plus aux programmes grandes écoles bac+5.
"D'autres modèles apparaissent, comme le BBA [bac+4] ou le bachelor [bac+3], avec 80% d'enseignement en économie-gestion, alors que le PGE reste propédeutique et lié à la classe prépa. Cette diversification répond à différents profils et besoins", explique Jean Charroin.
À Évry, la dimension géographique est aussi étudiée. "Nous observons ce que proposent les autres universités franciliennes et comment se répartissent les flux d’étudiants", précise Vincent Bouhier. Des parcours sont fermés ou renforcés pour mieux correspondre aux attentes, comme le LEA anglais-allemand ou l’évolution de la licence arts du spectacle vers art du spectacle et humanités.
Vers une concurrence acharnée pour recruter
La concurrence devient inévitable. "Recruter entraîne une compétition acharnée", estime Emmanuel Duflos. Mais cela permet aussi aux écoles de redéfinir leur stratégie.
Pour l’Essca, la solution passe par l’international. Son plan Kairos 2030 vise 1.600 étudiants supplémentaires, "à 80% par des étudiants étrangers", en accueillant des jeunes à Budapest ou Malaga avant de poursuivre leur cursus en France, explique Jean Charroin.
La question économique reste cruciale. La baisse démographique menace le modèle de financement public, calculé sur les effectifs étudiants. "Il ne faudrait pas que la baisse des effectifs entraîne une baisse des moyens", alerte Vincent Bouhier, d’autant que les universités affrontent déjà un contexte économique tendu.

SOURCE : Letudiant

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