Éducation : qui est SenseiDMots, le tiktokeur qui veut que les cours se terminent à 13 heures ?

La ministre de l'Éducation nationale, Anne Genetet, a invité le mardi 1er octobre SenseiDMots, influenceur TikTok, à la rencontrer. La pétition du jeune homme, qui approche les 300 000 signatures, propose d'optimiser l'emploi du temps des élèves du primaire et du secondaire pour favoriser des « activités ludiques » l’après-midi.

« La solution pour finir l’école tous les jours à midi ! Emmanuel Macron, j’attends ton appel », déclarait SenseiDMots dans une vidéo TikTok. Et il a été entendu. Le jeune influenceur, à l'origine d'une pétition à succès lancée il y a quelques semaines, a été convié à une rencontre avec la ministre de l'Éducation nationale, Anne Genetet, le mardi 1er octobre.

Sa pétition en ligne, rapidement devenue virale, compte presque 300 000 signatures. Sa proposition consiste à « optimiser l’emploi du temps » des collégiens et lycéens en concentrant tous les cours le matin, laissant l’après-midi libre pour des « activités ludiques » comme les arts plastiques, le sport, ou encore la musique.

À cette idée s’ajoutent deux autres objectifs : remplacer « les heures de colle » par des « séances de méditation, de réflexion ou de psychologie » pour prévenir le harcèlement scolaire ; et la création d’un « espace ouvert » dans chaque établissement, où les élèves pourraient exprimer leurs ressentis, partager leurs préoccupations et participer activement à la vie scolaire.

Un ingénieur de formation devenu influenceur

Ingénieur de formation, SenseiDMots, dont le pseudo fait référence au mot japonais « sensei » (Maître, garant du savoir), a commencé à publier des vidéos sur les réseaux sociaux il y a dix mois, en novembre 2023. Aujourd’hui, il compte plus de 500 000 abonnés sur TikTok, et est également actif sur Twitch, X (anciennement Twitter), Instagram, et Snapchat.

« À la fin d’un contrat en tant que chef de projet, je ne savais plus quoi faire : continuer dans l’ingénierie, vivre à l’étranger ? », confie-t-il à Konbini. « Alors j’ai commencé à faire des vidéos, et elles ont décollé. Une de celles qui a percé portait sur la manière dont l’école abîmait la relation parent-enfant. »

L’école, le rythme scolaire, la charge de travail... autant de sujets qui lui « tiennent à cœur ». « J’essaie de motiver les élèves », explique-t-il. « Maintenant, on commence à me reconnaître dans la rue, et il y a même une tendance sur les réseaux où les gens postent ma photo avec la mention “I need a hero” (J’ai besoin d’un héros, NDLR), c’est fou ! » Ses vidéos dépassent régulièrement les 500 000 vues, certaines atteignant même le million.

Surfer sur une « différence de génération »

Depuis le début de son initiative, SenseiDMots a visité plusieurs établissements d’Île-de-France pour recueillir les impressions des élèves, avant de se lancer dans un « tour de France des lycées et collèges », comme il l’explique sur son compte TikTok.

Pour les jeunes qu’il rencontre, son projet s’appuie sur « une différence de génération » avec ceux qui ont conçu le modèle scolaire actuel. Les élèves évoquent leurs « trajets trop longs », soulignent « la montée de la phobie scolaire et du harcèlement », et expriment le désir de « passer plus de temps avec leur famille ».

Un débat déjà ancien

L’idée avancée par SenseiDMots n’est pas nouvelle. « On surcharge les semaines de nos enfants », déclarait Emmanuel Macron avant la rentrée 2023. Déjà en 1986, le ministre de l’Éducation nationale, René Monory, souhaitait réformer le rythme scolaire en allégeant la journée de cours. Selon les études, l’attention maximale des élèves se situe vers 11 heures, tandis que leur vigilance diminue entre 13 et 15 heures, rappelle le ministère de l’Éducation nationale.

En 2010, une expérimentation avait déjà été menée dans une centaine d’établissements en France, avec des cours uniquement le matin, et des après-midis consacrés aux sports. « Les collégiens et lycéens se sentaient mieux physiquement, mais cela n’avait pas eu d’impact sur leurs résultats scolaires ni sur leur concentration », rapporte Sophie Vénétitay, professeure et secrétaire du syndicat Snes-FSU dans Ouest France.

Un projet qui pose des défis logistiques

Transports scolaires, organisation familiale, infrastructures… Bien que « révolutionnaire » pour les jeunes, le projet de SenseiDMots pourrait rapidement devenir un casse-tête logistique. « Il ne faut pas oublier les établissements en sous-effectif, et que les professeurs ne s'occupent pas que d'une seule classe », commente une internaute sous l’une de ses vidéos.

Face à l'ampleur du phénomène, la ministre a assuré sur ses réseaux sociaux qu’elle était « prête à écouter toutes les bonnes idées », tout en précisant qu’il fallait « rester réaliste » et que « toute l'organisation des cours ne va pas changer alors que l’année scolaire a déjà commencé ». De son côté, SenseiDMots a annoncé qu’il se rendrait au rendez-vous accompagné « d’une équipe de syndicats ».

SOURCE : LA CROIX