Lycée pro : trois proviseurs saluent l'idée des parcours différenciés mais s'interrogent sur leur organisation

Un mois après le début des parcours différenciés en fin de terminale professionnelle, instaurés par la réforme de 2023, AEF info a interrogé trois proviseurs de lycées professionnels sur la mise en place de ces parcours. Comme les représentants syndicaux, ils pointent l'indisponibilité des enseignants affectés à d'autres tâches à cette période et l'avancée des examens à la mi-mai, qui engendre de l'absentéisme chez les élèves et complique l'organisation des CCF. Ils soulignent aussi la difficulté d'organiser les cinq heures de travail personnel hebdomadaires et s'interrogent sur le contenu du parcours de poursuite d'études.
Les parcours différenciés en terminale pro : un fonctionnement adapté mais perfectible
Les parcours différenciés en terminale professionnelle, instaurés par la réforme du lycée professionnel, permettent aux élèves de choisir entre deux options : six semaines de PFMP supplémentaires (parcours de préparation à l'insertion professionnelle) ou six semaines de cours (parcours de préparation à la poursuite d'études).
Pour évaluer cette organisation, AEF info a recueilli les témoignages de trois proviseurs :
- Francis Bignoli, proviseur du lycée polyvalent des Marcs-d'Or à Dijon (69 élèves en terminale)
- Bertrand Tallon, proviseur du LP Éric-Tabarly aux Sables-d'Olonne (47 élèves)
- Alain Mallet, proviseur du LP Paul-Louis-Cyfflé à Nancy (96 élèves)
Des choix de parcours variables et un intérêt pour la gratification
Les proviseurs constatent des choix variés parmi les élèves. Aux Sables-d'Olonne, 77 % des terminales pro de Bertrand Tallon ont choisi la poursuite d'études, influencés par la présence de BTS et formations professionnalisantes dans l'établissement.
Alain Mallet a observé une inversion des tendances : 75 % des élèves, initialement orientés vers la poursuite d'études, ont finalement choisi l'insertion, motivés par la gratification.
Francis Bignoli constate que 55 % des élèves de son établissement ont opté pour la poursuite d'études, ce choix étant très dépendant des filières. Dans certaines formations, les élèves doivent obligatoirement poursuivre en BTS.
Des contenus de parcours de poursuite d'études hétérogènes
La construction des contenus des parcours de poursuite d'études reste complexe. Bertrand Tallon souligne le besoin d'adapter les contenus aux projets des élèves : certains nécessitent plus de théorie, d'autres plus de pratique.
Au lycée Éric-Tabarly, les parcours incluent des enseignements généraux et professionnels, mais aussi des compétences transversales, conçus avec les enseignants de BTS. Bertrand Tallon envisage de proposer différents modules pour s'adapter aux projets des élèves.
Au lycée des Marcs-d'Or, Francis Bignoli a travaillé avec les enseignants de BTS pour concevoir des parcours adaptés, incluant un volet numérique. Les élèves ont été regroupés selon leurs besoins et leurs niveaux, avec une organisation modulable en fonction de leurs attentes.
Tous les proviseurs soulignent la difficulté d'organiser les cinq heures de travail personnel hebdomadaires, en raison du manque d'encadrement précis et de l'absence de recommandations concrètes dans les guides officiels.
Des difficultés d'organisation liées à l'indisponibilité des enseignants
L'organisation des parcours est souvent entravée par l'indisponibilité des enseignants. Alain Mallet explique que les cours sont adaptés en fonction des professeurs disponibles, certains étant réquisitionnés pour des examens.
Malgré une organisation anticipée, Alain Mallet fait face à des absences imprévues qui perturbent les emplois du temps et alimentent l'absentéisme. Francis Bignoli confirme ces difficultés et indique que les emplois du temps ont dû être remaniés.
Pour prévenir ces situations, le LP Éric-Tabarly a aligné certaines classes et proposé du co-enseignement afin d'assurer la continuité des cours en cas d'absence. Certains professeurs ont même anticipé en faisant passer des oraux avant le départ en entreprise.
Un calendrier d'examens avancé qui complique l'organisation
L'avancement des examens du bac à la mi-mai complique également l'organisation des parcours. Bertrand Tallon souligne la difficulté de coordonner les épreuves ponctuelles et les CCF, provoquant un stress pour les équipes.
Pour Alain Mallet, l'avancement des épreuves et les premiers résultats de Parcoursup démobilisent les élèves. Il regrette un absentéisme important et craint que certains élèves n'assistent pas aux dernières épreuves.
Les enseignants ont également dû accélérer leurs programmes. Bertrand Tallon suggère de revenir à un bac en juin pour garantir la qualité des apprentissages, tout en reconnaissant que la période de réflexion offerte par les parcours est précieuse. Alain Mallet propose de réduire la durée des parcours pour prolonger la période de cours.
Une idée appréciée mais une mise en œuvre perfectible
Les proviseurs saluent l'idée des parcours différenciés mais critiquent une mise en œuvre chaotique. Alain Mallet déplore une organisation complexe, imposant de jongler entre deux emplois du temps et des contraintes imprévisibles. Il souhaite une évaluation approfondie et des ajustements.
Bertrand Tallon considère que réfléchir à la poursuite d'études est bénéfique, mais souligne le manque d'accompagnement pour les stages. Francis Bignoli approuve la possibilité offerte aux élèves de bac pro de sécuriser leur parcours ou de changer d'orientation, tout en soulignant l'absentéisme et l'impact des examens sur la dynamique de l'année.

SOURCE : AEF INFO

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