Pour les étudiants comme leurs profs, l’IA est désormais incontournable

Milo, un élève androïde au service de l’apprentissage

Milo, un prototype d’élève androïde doté d’une intelligence artificielle, a fait sa rentrée au premier rang d’un cours de l’école d’ingénieurs ECE. L’IA s’impose désormais dans les facultés et grandes écoles.

Avec sa coque en plastique blanc arrondie, Milo enregistre le cours et le retranscrit en texte. Les étudiants peuvent ensuite y accéder en format chatbot 24 heures sur 24 pour réviser, comprendre des notions complexes ou avancer dans la résolution de problèmes.

Ils peuvent lui poser des questions mais, contrairement à des outils génératifs comme ChatGPT ou Mistral, Milo ne fournit pas directement les réponses. Il propose des pistes et "indique comment il pourrait au mieux aider", explique Youssef Jaafar, étudiant de 21 ans ayant participé à sa conception.

Une révolution pour les pratiques pédagogiques

"L’IA transforme nos métiers de pédagogues et avance tellement vite qu’on a décidé de mettre un objet technique, une IA, au centre de l’école", déclare François Stephan, directeur de l’ECE et membre du groupe privé Omnes Education.

Au collège et au lycée, l’usage non déclaré de l’IA est considéré comme une fraude par l’Éducation nationale. Mais dans l’enseignement supérieur, beaucoup souhaitent au contraire l’intégrer aux pratiques.

"Tous les jeunes utilisent des outils de génération de contenus. Plutôt que d’interdire l’usage de l’IA, on le rend obligatoire mais on leur apprend à l’utiliser avec un esprit critique et éthique", résume François Stephan.

Les grandes écoles et universités s’adaptent

À Sciences Po, Luis Vassy a confirmé que l’établissement n’adoptait pas une ligne d’interdiction. "La question est de maintenir le sens de l’effort, la capacité à mémoriser et le rapport critique à ce que produit l’IA", souligne-t-il.

Le président de l’université PSL, El Mouhoub Mouhoud, rappelle pour sa part que les étudiants doivent renforcer leurs bases théoriques et mathématiques afin de maîtriser techniquement l’IA et d’en comprendre les enjeux juridiques.

Certains chercheurs, comme ceux du MIT, alertent toutefois sur un risque d’affaiblissement des capacités cognitives des étudiants face à l’omniprésence de l’IA.

La question délicate de l’évaluation des étudiants

L’une des grandes difficultés concerne l’évaluation des étudiants, à une époque où un devoir à domicile peut être produit en quelques prompts.

Marc Champesme, professeur d’informatique à l’université Sorbonne Paris Nord, estime que certains travaux semblent "entièrement faits par l’IA". Les alternatives, comme privilégier les oraux, s’avèrent toutefois chronophages.

Christine Neau-Leduc, présidente de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, souligne que les détecteurs de plagiat et d’IA sont encore "perfectibles" mais restent utiles, ajoutant que "le détecteur humain est sans doute le plus fiable". Plusieurs étudiants ont été envoyés en section disciplinaire au printemps pour triche à l’IA.

Vers de nouvelles méthodes d’évaluation

Pour Hrishikesh Desai, professeur à la State University of Arkansas, l’évaluation doit évoluer. Dans un article publié sur le site de l’Unesco, il propose de privilégier des exercices où les étudiants déconstruisent les productions de l’IA, comme critiquer une dissertation générée par ChatGPT en identifiant ses erreurs logiques ou ses biais.

Il recommande aussi des défis ouverts nécessitant de l’innovation : concevoir une solution à un problème environnemental local ou rédiger une histoire aux rebondissements imprévisibles. "C’est le cheminement intellectuel qui prend toute son importance", insiste-t-il.

Démonstrations de raisonnement, travaux remis en plusieurs étapes ou évaluations par les pairs peuvent ainsi remplacer les devoirs traditionnels.

L’IA s’impose aussi dans la recherche académique

Dans le domaine de la recherche, les revues internationales exigent désormais que les auteurs précisent les IA utilisées pour la rédaction de leurs articles, souligne Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

SOURCE : LE TÉLÉGRAMME