Effet de groupe, rire ou vengeance : un jeune sur cinq a déjà harcelé un camarade

Un baromètre inquiétant sur le harcèlement scolaire
À l’occasion de la Journée nationale de lutte contre le harcèlement, prévue ce jeudi 6 novembre, l’association e-Enfance a publié son baromètre annuel. Les résultats sont préoccupants : 19 % des jeunes reconnaissent avoir déjà participé à des actes de harcèlement, souvent sous l’influence d’un effet de groupe.
Réalisée en partenariat avec la Caisse d’Épargne, cette étude révèle que le harcèlement se nourrit d’un mimétisme social. Pour 45 % des jeunes interrogés, la dynamique collective est la principale cause de passage à l’acte, devant le désir de "rigoler" (19 %) ou la vengeance (18 %).
Même si 77 % des auteurs disent avoir pris conscience de la gravité de leurs gestes, 24 % récidivent malgré tout.
Le poids de l’effet de groupe
Le témoignage de Thomas, 17 ans, en terminale professionnelle à Clermont-Ferrand, illustre ce phénomène. Le jeune homme raconte être devenu harceleur "sans s’en rendre compte".
« Je faisais des blagues dégradantes sur son physique, je l’insultais au quotidien », explique-t-il. Selon lui, son comportement s’explique par un mal-être personnel : « À la maison, mon beau-père me rabaissait sans cesse. J’avais besoin de relâcher ma colère. »
Comme Thomas, près d’un jeune sur cinq a déjà participé à des actes de harcèlement, tandis que 37 % déclarent en avoir été victimes, selon l’étude d’e-Enfance.
Harceler pour s’intégrer
Dorian Trigatti, 24 ans, confie avoir harcelé à l’école primaire par mimétisme. « Je me suis accroché aux mauvaises personnes pour m’intégrer », raconte ce chargé d’événementiel à Nantes.
Pour Marie Quartier, professeure de lettres et cofondatrice du Centre ReSIS, le harcèlement repose sur « un effet de groupe très puissant ». Sortir seul de cette dynamique est difficile : « Il est dangereux pour un élève de se désolidariser du groupe sans accompagnement. »
Une méthode éducative pour responsabiliser les élèves
Marie Quartier forme les équipes éducatives à la méthode de la préoccupation partagée (MPPfr), un dispositif non accusatoire qui vise à responsabiliser les élèves.
« On prend l’élève harceleur à témoin de la souffrance de sa victime, afin de l’impliquer dans la résolution du conflit », explique-t-elle.
De son côté, Caroline Veltcheff, responsable du programme pHARe à l’Académie de Paris, estime qu’il faut agir rapidement : « Il faut d’abord résoudre la situation, mais si un élève récidive, il faut savoir dire stop. »
Le changement d’école des harceleurs : une mesure controversée
Le ministre de l’Éducation nationale, Édouard Geffray, a annoncé que plusieurs centaines d’élèves harceleurs avaient été changés d’établissement, conformément à un décret de 2023 qui permet à la victime de rester dans son école.
Mais pour Olivier Raluy, conseiller principal d’éducation et secrétaire national du Snes-FSU, cette mesure est une « fausse bonne idée » :
« Le harcèlement est un phénomène complexe. Le harceleur peut avoir été harcelé auparavant, et inversement. »
Des témoignages pour comprendre la complexité du harcèlement
Laura Hinigier, cofondatrice de l’association Kaïneo, a elle-même connu les deux facettes du phénomène. Harcelée pendant plusieurs années, elle raconte : « On m’excluait, on m’insultait sur mon physique. »
Au lycée, la jeune femme décide de ne plus être victime : « J’ai suivi les harceleurs pour me moquer à mon tour des élèves marginalisés. »
Aujourd’hui, elle milite pour un meilleur accompagnement psychologique des victimes comme des harceleurs : « Si on harcèle, c’est qu’on a un souci. »
Un délit puni par la loi
Selon le baromètre d’e-Enfance, 44 % des auteurs ressentent un mal-être après leurs actes, 32 % auraient voulu refuser de participer, et 24 % regrettent d’ignorer les sanctions légales avant de passer à l’acte.
Laura Hinigier raconte : « Un jour, une surveillante a prononcé le mot “harcèlement”. Ce fut un électrochoc. J’ai arrêté par peur des sanctions. »
Depuis la loi Balanant de 2022, le harcèlement scolaire est reconnu comme un délit, puni de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, même lorsqu’il n’entraîne aucune incapacité de travail.
Une lutte à mener sur tous les fronts
Pour Éric Debarbieux, spécialiste de la violence scolaire, la lutte contre le harcèlement ne doit pas se limiter au cadre judiciaire :
« Elle ne peut pas être uniquement pénale ou pédagogique. Alors que le rejet de l’autre devient un argument politique, il faut en faire un véritable combat de société. »

SOURCE : RTL

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