Entrer en prépa littéraire : ce que le jury regarde au-delà des notes, selon un professeur de Louis-Le-Grand

Olivier Andurand, professeur d’histoire en khâgne au lycée Louis-Le-Grand, détaille les critères de sélection sur Parcoursup ainsi que les débouchés possibles.

Olivier Andurand enseigne l’histoire en khâgne, la deuxième année de prépa littéraire, au lycée Louis-Le-Grand à Paris. Il nous explique ce qu’est une prépa littéraire et ce à quoi mènent ces deux années de formation. La prépa littéraire du lycée Louis-Le-Grand est l’une des plus sélectives avec 96 places et seulement 23 % d’admis sur Parcoursup en 2023. Mais elle ouvre les portes des écoles les plus prestigieuses. Cette même année, 17 étudiants ont intégré l’École normale supérieure (ENS) Ulm, l’établissement parisien des prix Nobel, plaçant ainsi Louis-Le-Grand au 3e rang des meilleures prépas littéraires de France, selon le dernier classement du Figaro Étudiant. Il existe d’autres prépas littéraires dans toute la France, comme celles de Jules Guesde à Montpellier, Le Parc à Lyon, ou encore Poincaré à Nancy. Les résultats de ces établissements sont également disponibles dans ce classement.

Qu’est-ce qu’une prépa littéraire ?

Olivier Andurand : Il s'agit d'un cursus pluridisciplinaire en deux ans, hypokhâgne puis khâgne, qui permet de se former à un haut niveau académique tout en acquérant rigueur et méthodes de travail efficaces. En prépa A/L, les étudiants suivent des cours de français, philosophie, langues (anciennes et vivantes), histoire et géographie. En prépa B/L, s’ajoutent des cours de mathématiques et de SES (sciences économiques et sociales). À la fin de l’hypokhâgne, ils se spécialisent dans des disciplines telles que les lettres classiques ou modernes, histoire ou géographie, tout en continuant à suivre le tronc commun. Ces élèves acquièrent une grande culture générale, qui est ensuite valorisée dans de nombreuses formations.

Nous ne nous interdisons pas de sélectionner des étudiants ayant choisi, par goût ou par obligation, une filière scientifique au lycée, tant que leur dossier est solide. S’ils sont attirés par les matières littéraires, ils ne doivent surtout pas se limiter !

Comment maximiser ses chances d’intégrer une classe prépa littéraire ? Quelles spécialités privilégier au lycée ?

Les pratiques de recrutement varient selon les établissements. À Louis-Le-Grand, nous valorisons les spécialités en lien avec les disciplines enseignées en CPGE : LLCER (langues, littératures et cultures étrangères), HGGSP (histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques), LLCA (littératures, langues et cultures de l’Antiquité), Arts, HLP (humanités, littérature et philosophie) et SES pour la prépa B/L. Nous acceptons également des profils scientifiques qui montrent une réelle motivation pour les matières littéraires.

Quels sont les critères de sélection sur Parcoursup ?

Les notes ne sont pas le seul critère. Les jurys accordent beaucoup d’importance aux appréciations des professeurs. Un dossier solide est souvent accompagné de commentaires élogieux des enseignants. La motivation joue également un rôle clé. Un élève aux résultats un peu moins brillants peut tout à fait être admis s’il montre de l’enthousiasme et un engagement en classe.

Quels sont les débouchés après une classe prépa littéraire ?

La prépa prépare principalement aux concours des Écoles normales supérieures (ENS Paris-Ulm, ENS Lyon, ENS Paris-Saclay), de l’École Nationale des Chartes ou de l’École du Louvre. Elle ouvre également la voie aux écoles de langues (ESIT, ISIT), de communication (CELSA), ou de commerce et management (HEC, Essec, ESCP). Les élèves des prépas B/L sont très recherchés pour leur ouverture d’esprit et leur solide culture générale.

Comment intégrer l’ENS Ulm après une prépa littéraire ?

À la fin de la deuxième année, les étudiants passent les concours de la banque d’épreuves littéraires (BEL) ou de la banque commune d’épreuves (BCE). Pour intégrer les ENS, les admissibles passent ensuite des épreuves orales. Les enseignants des classes prépas les y préparent avec rigueur.

Qu’est-ce que le concours B/L ?

Le concours B/L concerne la filière sciences économiques et sociales. Les étudiants de cette filière suivent des cours de SES et de mathématiques en plus du programme littéraire. Les prépas B/L sont moins nombreuses que les prépas A/L, qui se concentrent exclusivement sur les matières littéraires.

Que fait-on après l’ENS ?

Les débouchés sont multiples. La majorité des normaliens choisissent de faire de la recherche universitaire. Ils participent à des colloques internationaux et deviennent lecteurs dans des universités étrangères. L’ENS est également la voie royale vers l’agrégation, les thèses et l’enseignement supérieur. Certains préfèrent intégrer le secteur privé, qu’on appelle « pantoufler », même si les normaliens doivent travailler 10 ans pour l’État. Des anciens élèves se tournent aussi vers des carrières moins académiques, comme le journalisme, à l’image d’Augustin Trappenard ou Ali Baddou.

Que faire en cas d’échec en prépa littéraire ?

La plupart des étudiants poursuivent en faculté, où ils réussissent très bien. Certains choisissent de « khûber », c’est-à-dire de redoubler la deuxième année pour retenter les concours avec un programme renouvelé.

Faut-il être excellent pour tenter une prépa littéraire ?

Pas nécessairement. Certains élèves modestes en hypokhâgne deviennent brillants au fur et à mesure. Ils mûrissent intellectuellement et parviennent à décrocher des concours très sélectifs. Il est donc important de ne pas se censurer, tout en restant réaliste sur ses capacités.

Comment repérer le potentiel d’un candidat ?

Nous analysons les CV et les lettres de motivation avec soin. Les profils qui montrent une ouverture culturelle, un intérêt pour le théâtre, la musique, ou les arts sont toujours appréciés. Un candidat qui se projette au-delà de la prépa en visant un master précis montre également qu’il est motivé et prêt à s’engager pleinement dans la formation.

SOURCE : LE FIGARO ÉTUDIANT