La France pourrait devenir championne mondiale de l'IA, selon Philippe Corrot, cofondateur de Mirakl

Philippe Corrot, le président de Mirakl, une des licornes françaises éditant des logiciels de commerce en ligne, critique les taxes et hausses d’impôt visant les entreprises. Créée en 2012, Mirakl est devenue une licorne - une start-up dont la valorisation dépasse 1 milliard de dollars avant son introduction en Bourse - huit ans plus tard. Bien que Philippe Corrot, cofondateur avec Adrien Nussenbaum, n’apprécie pas ce terme, affirmant que cet « animal mythique n'existe pas, alors que notre entreprise est bien réelle », la performance reste notable. Malgré les difficultés de la French Tech, Mirakl, spécialisée dans les marketplaces - des sites regroupant différents vendeurs - poursuit sa croissance.

Parmi ses clients, on trouve des géants de la distribution tels que Carrefour, Decathlon, Macy's ou Leroy Merlin. Depuis trois ans, l'entreprise publie ses résultats, bien qu’elle n’y soit pas obligée, et a atteint un volume d'affaires de 8,6 milliards d'euros en 2023, en devenant rentable avec son produit phare, Mirakl Platform. Business angel, notamment dans Mistral AI, la figure montante de l’IA en France, Philippe Corrot, autodidacte de 48 ans, exprime son inquiétude face au climat anti-entreprises en France.

Les start-up françaises traversent-elles une crise ?

Philippe Corrot - L’euphorie postpandémie, qui avait fait monter en flèche les valorisations de nombreuses start-up, s’est estompée, et nous sommes revenus à une situation normale. Bien que les investisseurs soient aujourd’hui plus prudents, un fort engouement persiste pour l'IA, entraînant des valorisations stratosphériques pour les entreprises concernées. Cette révolution va s’accélérer bien plus rapidement qu'Internet, dont l'adoption a pris une quinzaine d'années. Le potentiel de l’IA est bien plus grand, et dans ce domaine stratégique, la France possède des atouts importants. Nous avons les moyens de devenir leaders dans cette industrie mondiale, mais j'ai des doutes sur la prise de conscience de nos dirigeants.

La régulation européenne pourrait avoir des effets dévastateurs

Les grands du secteur sont américains ?

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Oui, pour l’instant. Meta, Google, ou Nvidia dominent, mais Mistral a le potentiel de rattraper OpenAI rapidement. Aujourd’hui, 14 des 20 meilleurs experts mondiaux de l’IA sont français, ce qui nous donne un avantage considérable.

Le niveau en mathématiques en France est-il un frein ?

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Le niveau moyen a baissé, mais au très haut niveau, nous restons parmi les meilleurs, devant les Américains et les Chinois. Cet avantage pourrait être décisif en IA, à condition de ne pas le brider.

Comment éviter cela ?

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Un excès de régulation européenne et des démarches inadaptées risquent de nous freiner, comme le montre le rapport de Mario Draghi. Prenons exemple sur SpaceX d’Elon Musk : au lieu de concevoir un projet complexe comme Ariane, Musk est parti des besoins clients en respectant efficacité et coût. En tirant les leçons de cette réussite, nous éviterions de perdre nos talents et entreprises au profit des États-Unis et de la Chine.

Retenons les talents en favorisant le recrutement au plus haut niveau

Les discussions sur le projet de loi de finances sont-elles préoccupantes ?

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Absolument, et bien d’autres sujets inquiètent également. En France, « start-up » est devenu un terme péjoratif, et entreprendre est mal perçu. Les récentes propositions fiscales montrent une méfiance vis-à-vis des entreprises. Si les nouvelles taxes et hausses d'impôts sont adoptées, cela risquerait de faire fuir entrepreneurs, investisseurs et talents, créant un cercle vicieux pour notre économie.

Quelles mesures sont particulièrement nuisibles ?

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Remettre en cause le statut de « jeune entreprise innovante » ou diminuer le crédit impôt recherche serait absurde. Ces dispositifs coûtent peu à l’État et sont cruciaux. Il est essentiel de promouvoir l’innovation et de faciliter le recrutement de talents au plus haut niveau sans remettre en cause les exonérations de charges patronales dans la recherche et l’innovation. Le moment est crucial pour avancer, et reculer serait une grave erreur dans un contexte de révolution technologique mondiale.

SOURCE : LA TRIBUNE