Mia Seconde : À l’heure de ChatGPT, le tuteur sous intelligence artificielle de l’éducation nationale est-il déjà obsolète ?

Avec l’essor du robot conversationnel ChatGPT d’OpenAI, l’intelligence artificielle (IA) est au cœur des discussions dans le secteur de l’éducation. Alors que cette technologie novatrice attire l’attention des enseignants et des élèves, des outils plus anciens continuent d’être expérimentés dans les établissements scolaires. Cet article examine la pertinence du tuteur numérique Mia Seconde face à l’émergence des nouvelles technologies.

C’est un défi séculaire dans le domaine de l’éducation : comment adapter l’apprentissage aux besoins de chaque élève plutôt que d’imposer le même enseignement à tous ? Depuis les années 1960, des éducateurs ont envisagé le développement d’une IA capable de personnaliser l’apprentissage à grande échelle et à faible coût. La disponibilité de ChatGPT depuis 2022 a ravivé cet espoir, certains enseignants l’utilisant déjà pour personnaliser leurs cours.

Cependant, l’éducation nationale ne s’appuie pas sur cette technologie moderne, mais sur une méthode plus ancienne appelée « apprentissage adaptatif ». Après des expérimentations avec plusieurs entreprises à partir de 2020, le ministre Gabriel Attal a annoncé en 2023 le lancement de Mia Seconde, un tuteur numérique destiné à 800 000 élèves de seconde, afin de soutenir les cours de mathématiques et de français dès la rentrée 2024. Malgré cette annonce ambitieuse, Catherine de Vulpillières, cofondatrice de l’entreprise EvidenceB, développeuse du logiciel, précise que Mia Seconde n’est actuellement proposé qu’à quelques dizaines de milliers d’élèves.

Une technologie complexe sous une interface simple

À première vue, les menus de Mia Seconde semblent dépouillés, mais derrière cette simplicité se cache une technologie sophistiquée. En s’appuyant sur des milliers d’exercices aux variations de niveaux subtiles, le tuteur sélectionne pour chaque élève une série d’exercices adaptée à son niveau. Ce processus d’adaptation commence par un test de niveau initial et se poursuit grâce à une IA qui analyse le temps de réponse, les erreurs et le rythme de progression de l’élève. Christophe Jeunesse, directeur du département de sciences de l’éducation à l’Université Paris-Nanterre, souligne que l’objectif est de renforcer le sentiment de compétence chez l’élève et d’éviter qu’il ne perde motivation.

L'apprentissage adaptatif, une technologie dépassée ?

Le choix d’une plateforme reposant sur l’apprentissage adaptatif peut étonner, car cette approche a perdu de son attrait auprès des spécialistes en apprentissage numérique depuis 2017. Selon un sondage du cabinet Opensesame, des entreprises prometteuses comme Knewton et Amplify, qui ont émergé dans les années 2000 et 2010, ont vu leur valeur se réduire considérablement. Fien Depaepe, professeure au Centre pour la psychologie pédagogique et la technologie de l’Université catholique de Louvain, critique la majorité des systèmes déployés, qui sont souvent jugés trop basiques ou théoriquement mal fondés.

En conclusion, la question se pose : Mia Seconde représente-t-elle une avancée significative dans l’éducation numérique, ou est-elle une régression par rapport aux possibilités offertes par des technologies comme ChatGPT ? Alors que l’éducation continue d’évoluer, il sera essentiel d’évaluer l’efficacité et la pertinence de ces outils afin de mieux répondre aux besoins des élèves dans un monde où l’intelligence artificielle devient omniprésente.

SOURCE : LE MONDE