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ÉDUCATION
19
November 2024

Absence d'enseignants : un tribunal administratif condamne l’Éducation nationale à indemniser une famille

Un tribunal administratif a une nouvelle fois condamné l’Éducation nationale à indemniser une famille en raison des absences répétées d’enseignants, entraînant des pertes d'heures d'enseignement obligatoire. La collégienne concernée a obtenu du tribunal administratif de Paris une somme de 2 060 €. Antony Taillefait, professeur de droit public et co-directeur du master interuniversitaire Management et droit des organisations scolaires (M@dos), analyse la portée de cette décision.

Les absences non remplacées d'enseignants

Le collectif "onveutdesprofs", qui dénonce les pertes d'heures de cours dues aux absences non remplacées des enseignants, a déposé plusieurs recours depuis 2022. Malgré les mesures prises par le ministère, comme le "pacte enseignant" et la réorganisation des heures de formation continue, le tribunal administratif de Paris a de nouveau condamné l’Éducation nationale à indemniser une famille pour des absences non remplacées le 17 novembre 2024.

136 heures de cours manquantes sur une année scolaire

AC, collégienne en 4e dans le XVIIIe arrondissement de Paris, a vu sa mère estimer à 174 heures les absences d'enseignants non remplacées dans les matières obligatoires du programme. Le tribunal a retenu que l’élève avait été privée de 136 heures de cours obligatoires durant l'année scolaire 2021-2022. Le recteur a confirmé que ces absences concernaient plusieurs matières : mathématiques (14 h), histoire-géographie (9 h), anglais (25 h), espagnol (22 h), sciences de la vie et de la terre (7 h), physique-chimie (5 h), EPS (14 h), et éducation musicale (24 h). À cela s'ajoutent 9 heures de français et 7 heures d’arts plastiques.

Une tentative d'irrecevabilité de la part du recteur

Le recteur de l’académie de Paris a tenté une manœuvre dilatoire, contestant l’action en justice de la mère au motif que, séparée du père, le recours aurait dû être intenté conjointement. Toutefois, les juges ont rappelé qu’un tel recours relève de l’autorité parentale, et que l’action en justice est considérée comme un acte usuel de cette autorité, sans incidence particulière sur l’éducation de l’enfant.

Les manquements à la continuité du service public

Les juges ont examiné les obligations légales de l’Éducation nationale en matière d'enseignement. La loi de "refondation de l’école de la République" stipule que l’ensemble des enseignements dispensés dans le cadre de la scolarité obligatoire doit permettre à chaque élève d'acquérir un socle commun de connaissances. L’arrêté ministériel du 19 mai 2015 fixe les enseignements obligatoires et leur volume horaire. En s’appuyant sur ces dispositions, les juges ont identifié trois manquements à la continuité du service public de l’enseignement.

Trois manquements à la continuité du service public

Le premier manquement concerne le non-respect de l’obligation d’assurer l’enseignement dans toutes les matières obligatoires. Le volume total des heures manquantes (136 h) est suffisant pour constituer une faute de l’Éducation nationale. Le tribunal a souligné que cette faute était liée à l’organisation du service.

Le deuxième point concerne le préjudice subi par la jeune élève. Le tribunal a reconnu que l’élève avait subi un retard dans ses enseignements en raison du volume élevé des heures non dispensées.

Le troisième point concerne la demande d'indemnisation. L’Éducation nationale avait proposé une indemnité de 100 €, tandis que la mère réclamait 1 740 €. Le tribunal a condamné l’Éducation nationale à verser 1 360 € à la famille, soit 100 € par heure manquante, ainsi que 700 € pour les frais de justice.

Des indemnités faibles pour les familles

Malgré la condamnation de l’Éducation nationale, les indemnités restent faibles. Les juges administratifs ne peuvent pas contraindre l’État à procéder au remplacement rapide des enseignants absents. Le problème des absences répétées reste structurel et récurrent, alimenté par des difficultés de recrutement et d’organisation au sein de l’Éducation nationale.

Un recours en augmentation depuis 20 ans

Depuis près de 20 ans, le nombre de recours en justice a augmenté. La Cour des comptes a proposé plusieurs solutions pour remédier à ce problème, telles que la création d'un forfait annuel de remplacement ou une annualisation du temps de service. Toutefois, il demeure difficile de déterminer à partir de quel seuil d’absences la responsabilité de l’Éducation nationale est engagée, comme le montre la jurisprudence variable sur le sujet.

SOURCE : AEF INFO

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