Anxiété, dépression, pensées suicidaires… la détresse grandissante des étudiants en médecine : "on est en train de les perdre"

Le mal-être des étudiants en médecine s'aggrave. Selon une enquête menée par plusieurs associations et syndicats le 19 novembre 2024, un nombre croissant d'étudiants en médecine souffre d'anxiété, de symptômes dépressifs, d'idées suicidaires, ainsi que de violences sexistes et sexuelles.
Faire des études en médecine est-il dangereux pour la santé mentale ?
Oui, selon une enquête récente menée par l'Anemf (association nationale des étudiants en médecine de France), l'Isnar-Img (intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale) et l'Insi + (intersyndicale nationale des internes). L'étude, portant sur les étudiants en médecine de 2ᵉ année jusqu'à la fin de l'internat, révèle des témoignages alarmants : "Je me sens fatiguée quand je me lève le matin et que j'ai à affronter une autre journée à l'université", témoigne un étudiant. Un autre raconte : "Je vois mes coexternes s'effondrer en larmes au self régulièrement", et un interne confie : "Au fond de moi, j'ai le sentiment que je serai plus heureux si je change de métier."
Plus de la moitié des étudiants souffre d'anxiété
Les trois organisations avaient déjà publié deux enquêtes similaires en 2017 et 2021. En 2021, "deux tiers des étudiants étaient en burn-out. Un sur cinq consommait des anxiolytiques, et on nous avait dit que c'était dû au Covid", se souvient Bastien Bailleul, président de l'Isnar-Img. Trois ans plus tard, une nouvelle enquête, avec un questionnaire plus détaillé, confirme des résultats presque similaires. Plus de la moitié des étudiants souffrent toujours de symptômes anxieux. De plus, le nombre d'étudiants présentant des épisodes dépressifs caractérisés a augmenté (25 % en 2021 contre 27 % en 2024). Le pourcentage d'étudiants ayant des idées suicidaires est également en hausse, passant de 19 % en 2021 à 21 % en 2024.
Les humiliations et le harcèlement sexuel en baisse, mais les agressions sexuelles augmentent
Les humiliations et le harcèlement sexuel ont diminué depuis l'enquête de 2021. Les humiliations sont passées de 23 % à 14 %, et les cas de harcèlement sexuel ont chuté de 29 % à 22 %. Cependant, les agressions sexuelles pendant les études ont augmenté de 2 %. Deux tiers de ces agressions se produisent à l'hôpital, et 49 % sont commises par des médecins thésés, qui sont souvent les supérieurs hiérarchiques des internes.
Une pression de travail insoutenable
La dégradation de la santé mentale des étudiants est liée à plusieurs facteurs de risques psychosociaux. L'un des principaux est l'intensité du travail. Bien que la loi limite le nombre d'heures de travail des internes à 48 heures par semaine, en moyenne, ils travaillent 59 heures par semaine, et 10 % d'entre eux dépassent les 80 heures. Les externes, quant à eux, doivent assimiler une grande quantité de connaissances en vue du concours pour l'internat, mais avec un temps de préparation réduit à cause de la réforme des Épreuves Classantes Nationales (ECN).
L'exigence émotionnelle du métier
Le travail en médecine comporte une forte exigence émotionnelle : "On est au contact tous les jours de la souffrance et de la mort, ça nous demande beaucoup de charge mentale", souligne Bastien Bailleul. En outre, de nombreux étudiants témoignent du manque de soutien psychologique : "À aucun moment il nous a été proposé des groupes de paroles ou un accompagnement psychologique", confie Camille, interne en médecine générale. Le manque d'autonomie dans certains stages contribue également à cette détérioration de la santé mentale. Les externes doivent parfois se contenter de tâches administratives, tandis que les internes sont restreints dans leurs champs d'action.
Une situation de travail incertaine et des rémunérations insuffisantes
Les étudiants font face à des conflits de valeurs et à une insécurité dans leur situation de travail. L'insécurité des internes se manifeste par l'obligation de déménager tous les six mois, rendant difficile la projection dans l'avenir. Camille, par exemple, ne vit toujours pas à un endroit fixe, ce qui affecte son moral. Pour les externes, cette insécurité se reflète dans la faible rémunération des stages, à 2,76 euros de l'heure, ce qui est largement insuffisant pour subvenir à leurs besoins.
Quelles solutions ?
Face à cette situation alarmante, les trois organisations demandent au ministère de la Santé et au ministère de l'Enseignement supérieur la mise en place effective des 48 heures de travail hebdomadaire pour les internes et une revalorisation salariale des stages pour les externes. Elles réclament également une formation à la pédagogie et à la prévention des violences sexistes et sexuelles dans les parcours de formation des maîtres de stage universitaires et des praticiens hospitaliers. Enfin, elles demandent une harmonisation des plateformes d'écoute des étudiants, afin de simplifier l'accès aux ressources et d'assurer une meilleure prise en charge des étudiants.

SOURCE : FRANCE 3

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