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ÉDUCATION
12
April 2024

Deuxième acte de l'autonomie universitaire : une année pour explorer et persuader

Neuf établissements pionniers vont mettre en œuvre de nouvelles mesures d'autonomie. L'objectif est de généraliser cette initiative à l'ensemble du pays d'ici 2025. Si certains y voient une opportunité de flexibilité, d'autres craignent une dérégulation.

Après un premier acte en 2007 avec la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU), les universités s'apprêtent à entrer dans une nouvelle phase annoncée par Emmanuel Macron début décembre 2023.

Le calendrier de cette démarche a été précisé par Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur, le 26 mars. « L’objectif est clair : permettre à quelques établissements de tester une autonomie renforcée pendant une année et en tirer des enseignements pour une véritable deuxième étape », a-t-elle déclaré.

Si certains voient cette avancée comme un pas vers une plus grande souplesse, les syndicats redoutent une éventuelle dérégulation de l'enseignement supérieur.

Un échantillon de neuf établissements pilotes

Neuf établissements ont été sélectionnés pour expérimenter de nouvelles mesures : Sorbonne Université, l'université Paris 2 Panthéon-Assas, l'université de Rennes, l'université de Bordeaux, l'université de Pau, Aix-Marseille Université, l'université de Perpignan, l'université de Haute-Alsace et l'École Centrale de Lyon.

Ces établissements représentent une diversité dans le paysage de l’enseignement supérieur, allant des universités parisiennes aux établissements régionaux, en passant par une école d'ingénieurs. Ils diffèrent par leur taille, leur mode de gouvernance, leur spécialisation disciplinaire ou multidisciplinaire.

Ils partagent toutefois une certaine robustesse dans leur fonctionnement et une capacité, y compris financière, à innover, selon Pierre-Alain Muller, président de l’université de Haute Alsace.

Calendrier de l'expérience de l'autonomie : un an d'essai à partir de juillet

Depuis début avril, des inspecteurs généraux visitent les établissements pilotes pour préparer des avenants à leurs contrats d’objectif et de moyens. Ces avenants seront discutés dans les conseils d’administration des établissements en vue d'un démarrage des expérimentations en juillet. Celles-ci dureront une année.

Un premier bilan sera dressé avec les autres établissements à la rentrée. « Nous proposerons également un guide pratique pour partager les bonnes pratiques et inciter les établissements à s’en inspirer. Nous souhaitons le publier rapidement afin qu’il puisse également être utile aux nouveaux présidents élus », explique Guillaume Gellé, président de France Universités.

Après cette phase d'essai, la ministre souhaite « étendre les mesures retenues à tout le territoire national » au second semestre 2025, et envisage, si nécessaire, un projet de loi.

22 mesures à tester

Après la phase préparatoire, ces neuf établissements commenceront cet été à tester des expérimentations sur cinq thèmes : gouvernance, offre de formation, finances, patrimoine immobilier et ressources humaines. À ce jour, 22 nouvelles mesures d’autonomie ont été proposées par le ministère, en collaboration avec France Universités.

« Les établissements sont libres de choisir quatre à six mesures parmi la liste proposée ou d’en proposer de nouvelles », explique Stéphane Braconnier, président de l'université Paris-Panthéon-Assas. Son établissement n'a pas encore décidé des mesures à tester, mais s'intéresse particulièrement aux domaines de la formation, des ressources humaines et du patrimoine.

Un consensus sera essentiel à l'université de Haute-Alsace pour choisir les mesures à mettre en œuvre. « Nous allons définir ces mesures avec l'ensemble de la communauté : enseignants, étudiants et partenaires. Nous favorisons l'émergence d'idées à travers des groupes de travail et des séminaires », explique le président, Pierre-Alain Muller.

Accélérer un mouvement déjà enclenché vers l'autonomie

De son côté, l’université de Bordeaux a déjà commencé à explorer l'autonomie. Cette année d’expérimentation lui permettra d'aller plus loin en levant certains blocages réglementaires, sans nécessairement adopter de nouvelles mesures. Le président Dean Lewis veut éviter de surcharger l’établissement.

« Nous réclamons davantage d'autonomie dans la gestion budgétaire et financière depuis mon élection en 2022 », explique Dean Lewis, également vice-président de France Universités. En matière de ressources humaines, il évoque la gestion du personnel administratif, tout comme Stéphane Braconnier. Quant au patrimoine immobilier, « nous appelons à plus d’autonomie dans sa gestion », précise-t-il.

Les établissements auront également la possibilité d'aborder d'autres sujets, tels que la capacité d’emprunt, pour disposer de plus de marges de manœuvre pour la rénovation des campus.

« Nous aimerions également avoir le pouvoir de décider du nombre d'étudiants que nous pouvons accueillir. Actuellement, cette décision relève des rectorats. Quant à la vie étudiante, elle n’est pas officiellement une mission des universités selon le Code de l’éducation, et nous aimerions que cela change. Il ne s'agit pas de se substituer aux Crous, mais de travailler en étroite collaboration avec eux », ajoute Guillaume Gellé.

Des expérimentations qui nécessitent un soutien financier

Le soutien financier de ces expérimentations reste à déterminer. « Nous n'avons pas encore de visibilité sur les montants, car cela dépendra des mesures que nous expérimenterons », explique Stéphane Braconnier.

« Je ne peux pas faire plus avec un budget constant », prévient le président de l’université de Haute-Alsace. « Une autonomie sans ressources peut se transformer en une gestion de la pénurie. C'était un peu le cas lors de l'acte 1 de l'autonomie », rappelle Dean Lewis.

France Universités confirme que ces expérimentations ne pourront se faire qu'avec une augmentation des ressources, de nombreuses universités étant déjà confrontées à des difficultés financières.

Les syndicats redoutent une "dérégulation de l'enseignement supérieur"

L'annonce de cet acte II a été mal reçue par les syndicats. « Nous avions réussi à freiner les effets de la LRU, mais là, c'est une accélération. L'acte II met en péril l'enseignement supérieur public. Il accroît la dérégulation de l'enseignement supérieur pour favoriser le marché européen de la formation », déclare Caroline Mauriat, co-secrétaire générale du Snesup-FSU.

« Alors que nous constatons avec force les dégâts de l'acte I de l'autonomisation des universités, qui a favorisé l'émergence d'établissements publics expérimentaux proposant des formations financées directement par le marché privé, le gouvernement veut enclencher l'acte II », regrette l’Unef dans un communiqué.

Le syndicat étudiant craint que l'autonomie financière ne conduise à un désengagement accru de l'État, entraînant une dépendance accrue aux financements privés et une concurrence croissante entre les établissements. Il alerte ainsi sur le risque d'une université publique à deux vitesses.

L'autonomie synonyme de flexibilité accrue pour les universités ?

Stéphane Braconnier, président de l'université Paris Panthéon-Assas, qui a accepté « avec beaucoup d'enthousiasme » de participer à l'expérimentation, ne partage pas le même point de vue. « Nous croyons fermement en l'autonomie : elle doit être consolidée et renforcée », affirme-t-il.

Le renforcement de l'autonomie des universités est depuis longtemps une demande de France Universités, qui réunit les présidents d'université. « L'autonomie d'un établissement lui donne la souplesse nécessaire pour adapter les politiques publiques à l'échelle locale », soutient Guillaume Gellé. Selon lui, « une plus grande autonomie permettra aux universités de mieux répondre aux besoins de la société en matière de formation ».

SOURCE : https://www.letudiant.fr/educpros/actualite/acte-ii-de-l-autonomie-des-universites-un-an-pour-experimenter-et-convaincre.html

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