L'enseignement supérieur : un secteur en pleine expansion, convoité par les fonds d'investissement

L'enseignement supérieur français connaît une transformation profonde et rapide, attirant un nombre croissant d’investisseurs privés. En 2023, la France compte désormais environ 3 500 établissements d'enseignement supérieur, un chiffre en forte hausse par rapport aux années 2000 où le pays en dénombrait près de 2 000. Cette expansion reflète une nouvelle dynamique, marquée par une croissance de la demande en formation et par l'intérêt soutenu des fonds d’investissement. Pourquoi cet engouement pour les écoles et universités privées ? Quels sont les moteurs économiques et sociaux derrière cet essor ?
Un enseignement supérieur privé en plein essor
Chaque année, près de trois millions de jeunes s'inscrivent dans des établissements d'enseignement supérieur en France. La hausse démographique et l’accessibilité croissante des études supérieures renforcent cette demande. Autrefois considéré comme un modèle où « l’éducation est gratuite », le paysage éducatif français a évolué, avec une part significative des étudiants se tournant désormais vers des établissements privés. En 2023, environ 25 % des étudiants français sont inscrits dans des institutions privées, marquant une progression notable de 10 % entre 2021 et 2022.
Cette montée en puissance du privé s’explique par plusieurs facteurs. Tout d’abord, de nombreux étudiants et parents perçoivent le secteur privé comme une alternative aux universités publiques, souvent jugées trop théoriques et manquant d’encadrement. Des procédures comme Parcoursup, le dispositif d’orientation post-bac, laissent également chaque année des milliers d’étudiants sans solution, les incitant à se tourner vers des écoles privées. En 2021, ce sont plus de 91 000 candidats qui, à la fin de la procédure, n'avaient toujours pas reçu de proposition d’admission.
L'alternance : un levier de croissance pour les établissements privés
L’avènement de l’alternance, particulièrement post-Covid, a renforcé l'attractivité des écoles privées. Pionniers en matière de formations en alternance, les établissements privés proposent des cursus où les frais de scolarité peuvent être pris en charge par les entreprises, tandis que les étudiants bénéficient d’une expérience professionnelle. Cette approche attire des entreprises souhaitant recruter des talents à moindre coût tout en offrant aux jeunes une formation financée.
Les financements proviennent principalement des opérateurs de compétences (OPCO), alimentés par les contributions des entreprises. Cette situation profite aux établissements privés, dont certains affichent une croissance impressionnante depuis l'entrée en vigueur de la réforme de la formation professionnelle. Cette combinaison entre l'alternance, le financement privé et l'attractivité de formations professionnalisantes crée un cercle vertueux pour les institutions, stimulant leur expansion et celle du secteur.

L'intérêt économique des investisseurs pour l'enseignement supérieur
Le secteur de l'enseignement supérieur privé est devenu un marché attractif pour les fonds d’investissement, offrant des retours sur investissement intéressants. La demande en hausse et le financement limité pour les universités publiques ouvrent un espace croissant pour le développement des écoles privées. Le modèle économique de ces institutions est également favorable aux investisseurs : les frais de scolarité augmentent régulièrement, souvent entre 2 % et 5 % par an, permettant une trésorerie stable, car les étudiants paient leurs frais en début d’année.
Les petites écoles, de leur côté, se voient souvent contraintes de rejoindre des groupes ou d’en être rachetées en raison de la hausse des coûts opérationnels. Les dépenses en marketing, communication, infrastructures et outils numériques pour se démarquer dans un marché concurrentiel sont en effet de plus en plus importantes. Face à ces exigences, les établissements de taille modeste préfèrent souvent se rallier à de grands groupes pour mutualiser les coûts et profiter de la puissance de marque de ces derniers.

Les géants de l'enseignement supérieur en France
En France, six grands groupes dominent aujourd’hui le secteur de l'enseignement supérieur privé : Galileo Global Education, Eduservices, GES&Eductive, Ionis Education Group, INSEEC U. et l’INSEEC. Ensemble, ils possèdent plus de 200 écoles et attirent chaque année des dizaines de milliers d’étudiants.
- Galileo Global Education : Avec 57 écoles et 200 000 étudiants, ce groupe propose des formations diversifiées en commerce, droit, finance, santé, et métiers créatifs. En 2022, Galileo a investi 1,5 milliard d’euros pour renforcer son réseau, ajoutant notamment l’école de création artistique LMA à son portefeuille.
- Eduservices : Réunissant plus de 30 écoles et 34 000 étudiants, ce groupe est spécialisé dans les langues, le digital, le management, et la communication. Ses acquisitions récentes, telles que le CDAF-ESAP et Bachelor Factory, illustrent sa stratégie de croissance.
- GES&Eductive : Cette alliance rassemble environ 15 000 étudiants dans plus de 90 écoles, couvrant divers domaines de formation.
- Ionis Education Group : Avec 29 écoles et 30 000 étudiants, Ionis se positionne comme l’un des groupes les plus influents dans l’enseignement supérieur privé en France.
Ces grands groupes fonctionnent sur un modèle de "marque groupe" qui tend à prendre le pas sur les "marques écoles". En se regroupant sous une bannière unique, ils réduisent leurs dépenses marketing, centralisent les fonctions administratives et logistiques, et renforcent leur attractivité. Cette stratégie d’intégration et de synergies économiques se traduit par une meilleure gestion des coûts et une plus grande force de frappe sur le marché.
Un avenir prometteur pour l'enseignement supérieur privé
L'enseignement supérieur privé en France connaît une croissance sans précédent et une transformation structurante, soutenues par des fonds d’investissement attirés par le potentiel du secteur. Les regroupements et fusions entre établissements continueront probablement de se multiplier pour répondre à la demande croissante d’étudiants, en particulier dans un contexte de crise financière où la stabilité des frais de scolarité et l’alternance jouent un rôle clé. Ce phénomène illustre un basculement du système éducatif vers un modèle plus concurrentiel et axé sur les résultats, où le secteur privé occupe une place de plus en plus centrale.

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