HEC, Polytechnique, CentraleSupélec : dans les coulisses de levées de fonds records

Les grandes écoles françaises connaissent des levées de fonds spectaculaires. En novembre 2024, la Fondation HEC a levé 213 millions d’euros, un record historique pour l’établissement, suivi par la Fondation Polytechnique avec 200 millions d’euros et la Fondation CentraleSupélec avec 100 millions d’euros. Ces chiffres témoignent de l’ampleur inédite des campagnes de financement menées par ces institutions, qui visent à soutenir leurs projets ambitieux.
Des levées de fonds exceptionnelles
Le mardi 26 novembre, un événement marquant a eu lieu au théâtre Mogador, à Paris, où le compteur affichait fièrement 213 millions d’euros, une somme levée par la Fondation HEC entre 2019 et 2024. Ce montant a été collecté auprès de 6 000 donateurs, comprenant des anciens élèves, des entreprises et des particuliers. Un exploit qui double quasiment la levée précédente, qui s’élevait à 112 millions d’euros entre 2008 et 2013. Olivier Sevillia, président de la fondation HEC, a exprimé sa satisfaction, notant avec humour : « C’est pas mal », déclenchant des applaudissements enthousiastes parmi les alumni présents. Pour une école dont le budget annuel est de 205 millions d’euros, cette performance représente un véritable succès.
Un mois record pour les grandes écoles françaises
Le mois de novembre 2024 a été particulièrement fructueux pour les grandes écoles françaises. CentraleSupélec a réalisé un exploit en collectant 1 million d’euros lors d’une soirée organisée dans le cadre de sa campagne « Demain est IngénieurS ». L’objectif de cette campagne est d’atteindre 100 millions d’euros d'ici 2026. De son côté, la Fondation Polytechnique a lancé sa campagne « Servir la Science », visant 200 millions d’euros d’ici 2029, après avoir déjà récolté 85 millions d’euros. Ces campagnes illustrent une volonté commune de financer des projets d’envergure, allant des bourses sociales à la recherche, en passant par de nouveaux investissements immobiliers.
Des objectifs stratégiques ambitieux
Les levées de fonds visent à soutenir des projets stratégiques. Laura Chaubard, directrice générale de Polytechnique, détaille les enjeux, soulignant la nécessité de rénover des bâtiments datant des années 1970 tout en agrandissant les infrastructures pour accueillir un plus grand nombre d'étudiants. Un des projets phare est la création d’un espace dédié aux mathématiques, un lieu central pour l'enseignement, la recherche et l’animation scientifique.
Un tournant pour les écoles d'élite
Ces levées de fonds interviennent à un moment charnière pour ces écoles. Dans un contexte budgétaire difficile, ces campagnes permettent aux institutions de se renforcer financièrement et d’élargir leurs marges de manœuvre. Laura Chaubard insiste sur le rôle stratégique de ces financements dans un environnement éducatif international de plus en plus compétitif. Flavien Kulawik, président du comité de campagne de la Fondation CentraleSupélec, explique que sans ces fonds, l’école ne pourrait pas atteindre ses objectifs d’internationalisation.
La nécessité de se démarquer à l’international
Bien que soutenues par leurs ministères de tutelle (les Armées pour Polytechnique et l’Enseignement supérieur pour CentraleSupélec), ces écoles se retrouvent confrontées à une concurrence féroce. Des institutions comme le MIT ou l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) investissent des millions dans leurs campus et projets de recherche pour attirer les meilleurs talents. Dans ce contexte, la collecte de fonds devient essentielle pour rester compétitif et poursuivre l’ambition de ces grandes écoles.
La philanthropie, un pilier essentiel pour les écoles de commerce
Pour les écoles de commerce comme HEC, la situation est encore plus critique. Eloïc Peyrache, directeur général d’HEC, a souligné lors de l’événement que « le soutien de la fondation est aujourd’hui vital pour HEC et son ambition de devenir une marque mondiale ». Olivier Sevillia, quant à lui, insiste sur l’importance croissante de la philanthropie dans le modèle économique de l’école, à une époque où les subventions publiques se font de plus en plus rares.
L’évolution de la culture du don en France
La culture du don en France est moins développée que dans les pays anglo-saxons, mais elle est en pleine évolution. Flavien Kulawik croit fermement à un changement culturel. « L’ambition stratégique parle à tout le monde et beaucoup nourrissent aussi le devoir de rendre à l’école un peu de ce qu’elle leur a apporté », affirme-t-il. Ce phénomène est particulièrement visible parmi les alumni installés à l’étranger, qui sont plus habitués à répondre à ce type de sollicitations. Nathalie Bousseau, directrice de la Fondation CentraleSupélec, indique que pour la première fois, la fondation a récolté davantage de dons venant de l’étranger que de France.
Cibler les entreprises pour diversifier les donateurs
Pour passer à la vitesse supérieure, les fondations cherchent à diversifier leur communauté de donateurs. L’accent est mis sur les entreprises, qui peuvent soutenir des projets de recherche appliquée, tels que le centre Hi Paris ! d’HEC ou le programme de l’IP Paris dédié à l’intelligence artificielle, financé par des entreprises comme L’Oréal et Capgemini. De même, des initiatives sociales comme le « CMA CGM Excellence Fund for Lebanon », financé par la société CMA CGM, offrent des bourses à des étudiants libanais d’HEC. Laura Chaubard souligne que sur les 200 millions d’euros visés par Polytechnique, la moitié pourrait provenir des entreprises.
Un défi pour certaines écoles
Cependant, ces campagnes de levées de fonds d'envergure ne sont pas accessibles à toutes les écoles. Elles nécessitent un réseau d'anciens élèves puissant et une communauté soudée. Un autre défi majeur réside dans la volatilité des dons, qui peut compromettre la continuité de certains projets. C’est pourquoi certaines fondations commencent à constituer des fonds de réserve, via l’endowment, un fonds qui capitalise les dons pour générer des intérêts, permettant ainsi de financer des projets même en période de crise économique.
L’évolution du modèle économique d'HEC
Enfin, la fondation HEC joue désormais un rôle clé dans le financement de l’école. Elle est devenue actionnaire à 17,4 % de l’école, aux côtés de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris Ile-de-France. L’objectif est de renforcer l’autofinancement de l’école, en particulier pour ses investissements immobiliers, comme la rénovation de son campus. Olivier Sevillia a confirmé que l’école pourrait augmenter sa participation au capital jusqu’à 34 % dans les années à venir, afin de soutenir ses projets à long terme.
Les levées de fonds des grandes écoles françaises ne sont pas simplement des événements financiers, mais des stratégies permettant de renforcer leur compétitivité et d’assurer leur avenir dans un environnement éducatif global de plus en plus exigeant.

SOURCE : CHALLENGES

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