"La moitié de la classe utilise ChatGPT" : comment l'intelligence artificielle a généré de nouvelles formes de triche au collège et au lycée

Deux ans après l'ouverture en accès libre de ChatGPT, l'intelligence artificielle (IA) a rapidement trouvé sa place dans les méthodes de travail des élèves, bouleversant les pratiques pédagogiques et générant de nouvelles formes de triche au collège et au lycée. Si certains élèves s'en servent comme un simple outil d'aide à la rédaction, d'autres l'utilisent pour rédiger leurs devoirs entiers. Cette évolution a contraint les enseignants à repenser leurs méthodes de correction et d'évaluation.
L'IA, une aide précieuse... ou une triche déguisée ?
Tom, un élève de 1ère, se souvient parfaitement de l'instant où il a découvert le potentiel de ChatGPT : "J'étais en cours de physique, je m'ennuyais, alors j'ai donné l'exercice à l'IA, et elle m'a rendu une réponse en quelques secondes. C'est là que je me suis dit que ça pourrait vraiment m'aider !" Et effectivement, comme lui, de nombreux élèves, à tous les niveaux d'études, ont rapidement adopté ChatGPT pour l'utiliser comme une sorte de copilote. Certains l'emploient pour réviser, d'autres pour résoudre des exercices entiers, parfois sans hésiter à tricher en copiant-collant les textes générés.
Si l'on parle de révision, l'usage de l'IA semble moins problématique. Colombe, élève de seconde à Paris, l’utilise pour générer des questions types avant un examen ou pour résumer des notions. Elle précise : "Ce n’est pas répréhensible, je m’en sers pour m'entraîner." Mais les choses se compliquent lorsque ChatGPT est utilisé pour rédiger des travaux à remettre, comme des dissertations ou des commentaires de texte.
Le recours à l'IA : entre aide et triche
Rémy, lycéen, admet avoir utilisé ChatGPT lors de ses études, notamment en philosophie : "Je lui donnais tous les détails de notre leçon et je lui demandais une structure pour ma dissertation. Après, je faisais le texte final moi-même, mais ça m’a bien aidé à comprendre l’exercice." Cependant, certains élèves, comme Tom, vont plus loin. Après avoir généré des éléments de dissertation, il les affine en y ajoutant des détails personnels et même des fautes d'orthographe pour éviter d’être repéré. Cette méthode peut rendre la triche moins visible, mais elle reste une forme de contournement des règles.
Quand l'IA devient un outil de triche flagrante
Malheureusement, certains élèves vont jusqu’à utiliser ChatGPT de manière totalement malhonnête. Le copier-coller de textes générés par l'IA est l'exemple le plus flagrant de triche. Tom raconte comment, pour des QCM, il copiait directement les réponses générées par ChatGPT. Mais cela comporte des risques. En effet, l'IA peut parfois se tromper, et certains élèves ont été surpris par des erreurs grossières. "On avait demandé à ChatGPT d’associer un fruit à chaque planète du système solaire. La réponse était totalement fausse, mais l’IA ne nous garantissait rien de mieux", raconte Nicolas, un parent d'élève.
Les professeurs sont bien conscients de ces pratiques et commencent à développer des stratégies pour repérer les tricheurs. Maxime, professeur de sciences numériques, note que des signes peuvent alerter un enseignant : "Quand un élève rend un travail beaucoup plus élaboré que d’habitude, sans aucune faute d'orthographe, ou quand il cite des faits ou des chiffres dont on ne trouve pas la source." Ces indices permettent souvent de repérer les devoirs réalisés par l'IA, particulièrement au collège, où le langage employé peut être trop formel et décalé par rapport à celui des élèves.
Des enseignants face à un dilemme
Face à cette situation, les enseignants sont contraints de redoubler de vigilance. Jean-Marie, professeur de sciences numériques, explique : "Les exposés à l'oral sont souvent un bon indicateur. Un élève qui présente un travail dont il ne maîtrise pas les détails ou le vocabulaire montre souvent qu’il a utilisé une IA." Mais les enseignants se heurtent à un problème majeur : il est impossible de prouver formellement qu'un élève a eu recours à ChatGPT. Les outils de détection de texte généré par l'IA, qui existent sur le marché, sont souvent peu fiables.
Jean-Marie ajoute que les professeurs, souvent sans formation spécialisée, doivent apprendre à s’adapter au fur et à mesure, une tâche rendue plus difficile par les changements fréquents au ministère de l’Éducation nationale. Bien que des ressources aient été mises à disposition pour aider les enseignants à comprendre l’IA, les règles concernant son utilisation restent floues, ce qui rend l’identification des triches encore plus compliquée.
Les devoirs à la maison : une pratique remise en question
L'usage de l'IA soulève également une remise en question plus large des devoirs à la maison. Philippe, professeur de SVT, constate : "Si mon exercice peut être fait facilement par une IA, c’est qu’il n’est probablement pas assez intéressant." Cette évolution pousse certains enseignants à repenser la pertinence de certains types d'exercices. D'autres se préoccupent des inégalités entre les élèves, certains ayant plus de ressources, comme l’aide d’un parent, pour faire face à ces nouvelles technologies.
Un avenir incertain pour les enseignants et les élèves
En somme, l’IA modifie profondément les pratiques éducatives et pose un défi aux enseignants, qui doivent faire face à cette nouvelle réalité tout en s'adaptant aux outils numériques. Si certains estiment que l'IA peut être un moyen d'enrichir l'apprentissage, d’autres redoutent qu’elle ne devienne un levier pour contourner les règles et fausser l’évaluation des élèves. Le combat entre enseignants et élèves, ou plutôt entre ChatGPT et la pédagogie, semble être loin d’être terminé.

SOURCE : FRANCE INFO

Nos réalisations
Découvrez nos références, nos réalisations et nos travaux pour des établissements.
C'est tout frais de nos experts

"ChatGPT nous oblige à redéfinir notre métier" : un professeur d’histoire-géo spécialisé en intelligence artificielle

Nouveau bachelor agro : les modalités détaillées dans des projets de décrets
