L'apprentissage, gisement d'économies budgétaires pour le prochain gouvernement

Les subventions massives à l'embauche d'apprentis accordées ces dernières années ont entraîné des effets d'aubaine, constate une revue de dépenses publiques dévoilée cette semaine. Elle préconise plus d'un milliard d'euros d'économies.

C'est un symbole des politiques macronistes en matière d'emploi, mais aussi un gisement non négligeable d'économies pour le futur gouvernement, quel qu'il soit. Abondamment subventionnés depuis 2020 afin de gonfler le taux d'emploi, l'apprentissage et la formation professionnelle sont aussi au cœur d'une des revues de dépenses commandées fin 2023 par la Première ministre de l'époque, Élisabeth Borne, pour dégager des sources d'économies budgétaires.

Celle-ci connaissait bien le sujet pour avoir elle-même, en tant que ministre du Travail, considérablement augmenté ces subventions, de l'ordre de 50 %. Le gouvernement visait alors le million d'apprentis (un record a été atteint en 2023 avec 852 000 personnes), mais au prix d'un effet d'aubaine pour les entreprises, plusieurs fois dénoncé, notamment par l'économiste Bruno Coquet qui considère une bonne part de cette dépense comme « parfaitement inefficiente ». De quelle ampleur est la dépense ? Dans leurs conclusions, rendues en mars mais portées à la connaissance du public cette semaine, l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) l'estiment à 14,4 milliards pour l'apprentissage en 2022, presque le double de 2020 (7,9 milliards). Et à 16,1 milliards d'euros pour la formation professionnelle la même année, en hausse de plus d'un tiers sur deux ans.

Objectifs d'économies

Dans leurs conclusions, les deux services soulignent aussi l'existence de ces « effets d'aubaine », surtout concernant l'embauche d'apprentis suivant des formations de niveau licence ou master, qui ont généralement moins de difficultés à s'insérer dans le monde du travail. Au total, elles préconisent de couper près de 1,1 milliard d'euros dans l'apprentissage, tout en y générant 420 millions d'euros de recettes. De quoi atteindre les objectifs d'économies que s'était justement fixé le gouvernement d'Élisabeth Borne.

Listées dans un tableau, plusieurs mesures permettraient d'y parvenir. Principalement, les auteurs préconisent de « supprimer la prime pour les niveaux 6 (licence) et 7 (master) aux entreprises de 250 salariés et plus ». Autrement dit, de ne plus verser 6 000 euros par contrat d'apprentissage aux entreprises de cette taille qui auraient recours à des apprentis de niveau bac + 3 ou plus. Ce qui générerait 554 millions d'économies en 2025.

Forfait déjà appliqué sur le CPF

Parallèlement, le document préconise de mettre à contribution les apprentis eux-mêmes, ou plutôt leurs parents – puisqu'ils sont bien souvent rattachés à leur foyer fiscal – en soumettant leur rémunération à l'impôt sur le revenu, pour un « gain maximal de 459 millions d'euros » qui porterait surtout, avancent les auteurs, sur les ménages les plus aisés. Mais aussi en baissant le seuil à partir duquel cessent les exonérations de cotisations sociales salariales sur les rémunérations d'apprentis. Près de 280 millions d'euros pourraient être engrangés en abaissant ce seuil de 0,79 smic à 0,5 smic.

La formation professionnelle représente un réservoir d'économies moins fourni aux yeux de l'IGF et de l'Igas : elles suggéraient d'y réaliser 420 millions d'euros de coupes. Une de leurs préconisations a déjà été mise en œuvre par le gouvernement de Gabriel Attal : la mise en place d'un ticket modérateur sur le compte personnel de formation. Depuis le 1er mai, un forfait de 100 euros est ainsi appliqué à toute personne passant par cet outil pour suivre une formation, à l'exception des demandeurs d'emploi et des salariés dont l'employeur finance la formation. Une mesure qui va au-delà de la préconisation formulée par l'IGF et l'Igas, lesquelles évoquaient une modulation pour que le forfait aille de 30 à 80 euros par formation.

SOURCE : LIBÉRATION