Les incubateurs et masters entrepreneuriaux : entre tremplins pour l'innovation et défis éducatifs

Les incubateurs et masters spécialisés en entrepreneuriat se multiplient au sein des écoles supérieures françaises, offrant aux étudiants un tremplin pour concrétiser leurs projets innovants. Ces dispositifs, alliant accompagnement pratique et formation académique, contribuent à façonner une nouvelle génération d'entrepreneurs.

Dans un contexte économique en pleine mutation, les établissements scolaires supérieurs français ont développé diverses initiatives pour soutenir l'entrepreneuriat étudiant. Aux côtés des cursus académiques traditionnels, les incubateurs se sont imposés comme des structures incontournables, fournissant aux jeunes créateurs d'entreprises les outils et réseaux nécessaires à la réalisation de leurs projets. Entre 2009 et 2018, le nombre d'incubateurs a augmenté de 243 % dans le monde, passant de 590 à 2616, dont 400 en France. Couplés aux masters spécialisés en entrepreneuriat, ces dispositifs forment un écosystème où se rencontrent innovation, compétences techniques et ambitions entrepreneuriales.

Les incubateurs : tremplins pour l'entrepreneuriat étudiant

Les incubateurs des écoles supérieures jouent un rôle central dans la transformation des idées en entreprises concrètes. À l'Efrei, par exemple, l'incubateur accompagne les étudiants tout au long de leur parcours académique. Ludivine Pirlet, responsable de l'incubateur, explique : "Nous avons un programme de pré-incubation de six mois pour être en phase avec leur volonté d'entreprendre. Une fois que nous constatons qu'ils avancent bien, nous les passons en incubation, qui peut durer jusqu'à 18 mois. Ensuite, nous les aidons à créer leur entreprise et à formaliser leurs statuts, avant de rechercher des subventions." Ce statut permet aux étudiants de se concentrer sur leur projet entrepreneurial grâce à un stage de six mois, plutôt que d'intégrer une entreprise classique. Ainsi, les jeunes innovateurs disposent du temps nécessaire pour transformer leurs idées en véritables projets économiques.

Parallèlement, des programmes de pré-incubation de six mois sont proposés pour tester la viabilité des projets avant une phase d'incubation plus prolongée. Durant cette période, les étudiants sont encadrés et formés à la recherche de subventions et à la formalisation de leur entreprise. Ludivine Pirlet précise : "C'est ce qui est relativement classique. À ce stade, ils peuvent bénéficier de six mois de stage dédié à leur projet au lieu de rejoindre un groupe." Cet accompagnement offre aux étudiants un cadre favorable pour développer des projets allant du data engineering à des solutions dans le domaine de la finance IT, reflétant ainsi les tendances actuelles du marché.

Masters spécialisés : formation académique et ambition entrepreneuriale

Les masters spécialisés en entrepreneuriat jouent un rôle complémentaire à celui des incubateurs, en offrant une formation structurée qui allie connaissances théoriques et pratiques. À l'École des Mines de Paris, par exemple, le master spécialisé (MS) en DeepTech, créé en 2018, répond à un besoin dans le paysage entrepreneurial français, comme l'explique Wim Wassenhove, responsable de la formation. "Cédric Denis-Rémi, actuellement vice-président d'entrepreneuriat, développement et innovation de l'université PSL, a décidé de créer le MS entrepreneur deeptech. En effet, à l'époque, il manquait de startups parce qu'il n'y avait pas suffisamment de porteurs de projets. Aujourd'hui, nous formons les étudiants pendant 18 mois tout en les mettant en relation avec les chercheurs de PSL qui possèdent des brevets, des innovations et des technologies."

Les résultats de ce programme sont probants : des startups comme Sublime Énergie, exploitant une technologie de liquéfaction de biogaz, sont nées de cette initiative et ont levé plusieurs millions d'euros. Wim Wassenhove ajoute : "Lors de notre première promotion, nous avons trouvé quatre candidats, dont deux se sont associés avec un chercheur des Mines. Ils ont créé Sublime Énergie, une startup à mission spécialisée dans la liquéfaction du biogaz issu des déchets organiques de l'agriculture, qui existe toujours et vient de lever récemment 13 millions d'euros." La spécificité de ce master réside notamment dans son ouverture à des profils expérimentés ainsi qu'à de jeunes docteurs souhaitant transformer leurs thèses en projets entrepreneuriaux. Cette diversité enrichit l'apprentissage tout en contribuant au développement des startups technologiques en France.

La différence entre écoles de commerce, d'ingénieurs et spécialisées dans la tech

Une question demeure : les incubateurs et les masters d'entrepreneuriat sont-ils identiques d'une école à une autre ? La réponse varie en fonction des établissements. Laura Hassan, directrice générale d'Epitech Digital School, souligne la particularité de son école, qui place la technologie au cœur de l'apprentissage, non comme une finalité, mais comme un outil au service d'enjeux business, sociétaux ou environnementaux : "Nous ne faisons pas que de la tech, et surtout, ce n'est pas la finalité. La tech sert soit des enjeux business, soit des enjeux sociétaux, soit des enjeux environnementaux."

L'approche d'Epitech Digital School, qui combine technologie et gestion de projets, se distingue des écoles de commerce plus traditionnelles, comme le souligne Laura Hassan. "Nous sommes à la croisée entre tech et business... Nous formons une génération désireuse d'entreprendre et de devenir son propre patron. [...] C'est pourquoi j'ai décidé que tout le campus accueillerait un incubateur." Les étudiants sont préparés à résoudre des problèmes réels, et cette méthodologie les aide à répondre aux besoins concrets des entreprises et à innover de manière pragmatique. Cette approche contraste avec celle des écoles de commerce traditionnelles, où la technologie est souvent perçue comme un complément à l'apprentissage du business.

Une dynamique entrepreneuriale en expansion dans les écoles supérieures

Les incubateurs et masters spécialisés en entrepreneuriat dans les écoles supérieures françaises représentent une formidable opportunité pour les étudiants d'acquérir les compétences nécessaires à la création d'entreprise tout en bénéficiant d'un accompagnement structuré. Les succès des startups issues de ces dispositifs démontrent que cette stratégie est fructueuse, tant pour les établissements que pour les jeunes entrepreneurs.

Cependant, des défis demeurent. Comme l'indique Wim Wassenhove, une meilleure synergie entre les écoles d'ingénieurs et de commerce pourrait accélérer le développement de startups deeptech, un secteur où la France aspire à se positionner en leader : "Cela semble pertinent pour la deeptech notamment. Nous avons des compétences en innovation recherchées par les écoles de commerce. Les associer pourrait faire avancer les recherches dans de nombreux secteurs." Malgré ces défis, la multiplication des incubateurs et masters spécialisés témoigne d'un essor de l'entrepreneuriat étudiant en France, contribuant à former une nouvelle génération d'innovateurs, prête à relever les défis économiques, technologiques et sociétaux de demain.

‍

SOURCE : L'YONNE