L'IA menace-t-elle l'apprentissage des langues ?

Est-il encore nécessaire d'apprendre des langues étrangères à l'heure où les smartphones sont équipés de traducteurs automatiques ? Si cette idée inquiète certains, il semblerait que l'intelligence artificielle (IA) offre aussi de nouvelles perspectives pour l'apprentissage des langues.

En 2024, la société OpenAI, spécialisée dans l'intelligence artificielle, a présenté GPT-4-o, un nouveau modèle de langage capable de « raisonner » et d’interagir avec du texte, des images et des sons.

Dans l'une des vidéos publiées après ce lancement, deux personnes demandent à GPT-4-o de traduire en direct leurs échanges de l'anglais à l'espagnol et inversement, permettant à chacun de s'exprimer dans sa langue maternelle, aussi appelée L1.

Dans une autre démonstration, GPT-4-o engage une conversation, adapte son timbre de voix et répond aux demandes spécifiques des interlocuteurs quant au style et au ton de la discussion.

Des téléphones qui « parlent » toutes les langues ?

Pour ceux qui se souviennent de C-3PO, le droïde de Star Wars capable de parler des millions de langues, ces vidéos peuvent sembler anodines. Cependant, elles marquent une étape importante.

L'utilisation simple et naturelle de ces technologies indique un changement majeur dans notre façon d’interagir avec elles. On prend son téléphone, on parle dans sa langue natale, et on peut désormais échanger avec quelqu'un dont on ne connaît pas la langue.

Alors, pourquoi apprendre une langue étrangère si notre téléphone peut toutes les « parler » ? Quel sera le rôle de l'enseignement des langues dans ce contexte ?

Les hypothèses catastrophistes : la fin de l'apprentissage des langues

Certains pensent que les nouvelles technologies vont rendre l'apprentissage des langues obsolète, réservé aux spécialistes, comme dans la série Fondation d'Isaac Asimov, où tout le savoir humain, y compris les langues, est conservé par une fondation.

Dès les années 1970, l'apprentissage assisté par ordinateur reposait sur des théories comportementalistes : répétition d'exercices et renforcement. Dans ce cadre, l'ordinateur devient l'enseignant infaillible, rendant le professeur presque superflu.

Les hypothèses inclusives : un enseignement des langues renouvelé

D'autres voient l'IA comme un allié dans l'apprentissage des langues, aidant à rédiger des courriers électroniques, à résumer des informations ou à améliorer des textes en fonction de nos besoins spécifiques.

Cependant, cela soulève de nouveaux défis. L'enseignement des langues est aujourd'hui encadré par des institutions officielles, comme le ministère de l'Éducation. L'IA remet en cause ce modèle, en particulier lorsque l'évaluation de l’élève repose sur sa production personnelle, orale ou écrite.

Par ailleurs, l'apprentissage informel des langues connaît une expansion, notamment avec des applications comme Duolingo, qui concurrence l'enseignement traditionnel depuis la pandémie. D’après Duolingo, l’espagnol est la deuxième langue la plus étudiée dans le monde, avec 17 % des utilisateurs.

Enfin, bien que nous ignorions encore comment l'IA modifiera notre relation à la lecture et à l’écriture, elle transformera sans aucun doute les méthodes d’enseignement. Dans ce contexte, la capacité des élèves à évaluer de manière critique les produits de l'IA sera essentielle.

Une connaissance des langues importante pour la formation personnelle

Même si les nouvelles technologies pourraient, à terme, éliminer les barrières linguistiques, l'apprentissage des langues restera central dans l'éducation formelle pendant encore de nombreuses années.

Professionnellement, la maîtrise de plusieurs langues demeurera une compétence clé dans divers contextes culturels, y compris dans le monde de l'entreprise. De plus, des études ont montré que l'apprentissage des langues renforce nos capacités analytiques et notre aptitude à l’abstraction.

En conclusion, utilisée de manière réfléchie, l'IA générative offrira de nombreuses opportunités pour approfondir l'apprentissage et l'utilisation des langues étrangères, aussi bien en classe qu'en dehors.

SOURCE : THE CONVERSATION