L'urgence d'éduquer aux médias

"Aux États-Unis, le nombre de faux sites d’informations locales (1 265) dépasse désormais celui des médias locaux authentiques (1 213). Il est difficile pour les médias de promouvoir l’importance vitale de l’information dans ce contexte de désinformation industrielle. Comment dire aux lecteurs : 'Abonnez-vous ! C’est pour le bien de la démocratie' ? Pourtant, il y a urgence," écrit Laurent Marchand, rédacteur en chef adjoint chargé de l’international.
Les déserts de l’information
Les spécialistes parlent de "déserts de l’information" pour désigner ces espaces où aucun média local n’est présent. D’après l’université Northwestern, 204 des 3 000 comtés aux États-Unis n'ont aucun journal, site numérique local, rédaction de radio publique, ou publication ethnique. Un phénomène comparable aux zones blanches en téléphonie mobile.
Ces déserts sont rapidement colonisés par les artisans de la désinformation. Selon un rapport publié cet été par le groupe de recherche NewsGuard, le nombre de faux sites d’informations locales dépasse maintenant celui des médias authentiques aux États-Unis. De plus, l’intelligence artificielle générative, déjà active, ne fera qu’accélérer ce processus.
La désinformation et la guerre hybride
Parmi ces faux sites, 167 ont été identifiés comme des sources de désinformation russe. La sphère médiatique publique est ainsi polluée, devenant le terrain d'une guerre hybride menée par des puissances autoritaires comme la Russie, la Chine, et l’Iran. Mikko Salo, fondateur de Faktabaari, une ONG finlandaise de surveillance de la désinformation, souligne l’urgence de sensibiliser le public sur le fonctionnement des modèles d’IA et d’identifier les contenus qu’ils produisent. Lors des Dialogues européens de l’Institut français à Helsinki, il a abordé le thème de la désinformation et des guerres hybrides, en partenariat avec Ouest-France.
L'exemple finlandais : dès 4 ans
Au départ, Faktabaari visait la vérification des faits et le combat contre les fake news, mais l’ONG s’est rapidement concentrée sur la formation et l’éducation aux médias. "Les jeunes sont fréquemment exposés à des sources peu fiables, souvent via les réseaux sociaux, ou à l’absence de sources dans le cas de l’IA générative," explique Mikko Salo. En Finlande, dès l’âge de quatre ans, les enfants reçoivent une éducation numérique hebdomadaire. Le pays, qui occupe la première place mondiale en termes de bonheur, se distingue aussi par une confiance élevée en démocratie, en société et dans les institutions. Ainsi, 69 % des Finlandais déclarent avoir confiance dans leurs médias, contre 50 % en Suède et seulement 30 % en France.
Une résistance médiatique nécessaire
"On parle souvent de résistance face aux pressions de la désinformation russe," affirme Kaius Niemi, directeur de Reporter sans frontières (RSF) en Finlande. En Finlande, 63 % du trafic sur les sites d’information provient directement des utilisateurs, sans passer par les moteurs de recherche ou les réseaux sociaux, signe de la confiance envers les médias nationaux.
Face à cette désinformation massive, il est de plus en plus difficile pour les médias de promouvoir leur importance. La situation est même devenue un enjeu de sécurité nationale. D'ici cinq ans, selon le numéro deux de l’Otan, 90 % des contenus sur les réseaux sociaux pourraient être faux en raison de l’essor de l’IA générative.

SOURCE : OUEST FRANCE

Nos réalisations
Découvrez nos références, nos réalisations et nos travaux pour des établissements.
C'est tout frais de nos experts

"ChatGPT nous oblige à redéfinir notre métier" : un professeur d’histoire-géo spécialisé en intelligence artificielle

Nouveau bachelor agro : les modalités détaillées dans des projets de décrets
