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ÉDUCATION
31
January 2025

Parcoursup : comment ouvrir les portes au lieu de les fermer ?

Depuis le 15 janvier, les élèves de terminale ont entamé, non sans stress, leurs démarches sur Parcoursup. Selon les instances politiques, la plateforme a pour but de gérer au mieux le flux massif d’étudiants face à une offre de plus en plus abondante et diversifiée. Le nombre d’étudiants dans le supérieur a triplé depuis 1980, et entre 2000 et 2010, le nombre de masters homologués a presque doublé.

Dans un rapport récent, mais passé relativement inaperçu, la direction générale du Trésor (DGT) met en avant un défi crucial pour la collectivité, au cœur du dilemme de l’orientation : « Conjuguer les aspirations individuelles des étudiants et les compétences demandées par le marché du travail ».

Une orientation influencée par les goûts plutôt que par la rentabilité

Ce défi est particulièrement sensible en France, où l’orientation des bacheliers reste relativement libre, tout en étant influencée par l’idée que les formations doivent être en lien direct avec les besoins du marché du travail. Dans cette optique, Parcoursup vise à encourager les élèves à choisir des filières où leurs chances de réussite sont élevées et où les débouchés professionnels sont attractifs (salaires, taux d’embauche, etc.). Ces critères sont désormais accessibles via la plateforme afin d’aider les jeunes à prendre une décision plus rationnelle.

Pourtant, les économistes de la DGT constatent que les nouveaux bacheliers ne privilégient pas toujours les filières les plus rentables économiquement. Cela peut entraîner une insertion professionnelle plus difficile et un taux de chômage plus élevé, ainsi qu’un nombre important d’emplois non pourvus. De plus, beaucoup d’étudiants échouent ou se réorientent, ce qui génère des coûts aussi bien pour eux que pour les finances publiques.

Mais les jeunes sont-ils réellement irrationnels ? Ou bien le modèle économique du « décideur rationnel » est-il trop éloigné de leur manière de penser au moment de choisir une formation ?

Une enquête du Crédoc, citée dans le rapport de la DGT, montre que les principaux critères de choix des étudiants sont avant tout leurs goûts personnels, bien avant la rentabilité économique ou même les chances de réussite. Le « goût pour un métier ou un secteur » arrive en tête, suivi de près par le « goût pour une discipline ».

Un enseignement trop théorique ?

Il ne s’agit pas de remettre en cause la transparence apportée par Parcoursup, qui a permis d’améliorer un système auparavant opaque et peu efficace. Cependant, il est important de s’interroger sur l’origine de ces « goûts », qui se développent principalement durant le parcours scolaire.

Pourquoi les matières scientifiques sont-elles si peu attractives ? Le système éducatif français a longtemps considéré les mathématiques comme une discipline élitiste, avec des débouchés souvent perçus comme abstraits. Plus généralement, l’ensemble des disciplines académiques est enseigné de manière théorique, sans mise en perspective concrète dans la vie professionnelle. Les enseignants, formés à un haut niveau universitaire, restent souvent éloignés des réalités du monde du travail.

Les élèves manipulent peu d’objets concrets et créent rarement quelque chose de tangible. L’image associée aux filières techniques reste également négative, étant souvent perçues comme des voies de secours pour les élèves en difficulté. Ce manque de lien avec la réalité professionnelle joue un rôle majeur dans le désintérêt pour certaines formations et contribue à restreindre le champ des possibles.

Des choix d’orientation précoces et rigides

Dans le même temps, les décisions d’orientation se jouent très tôt. Avec la réforme du bac, un élève qui abandonne les mathématiques à 16 ans se retrouve quasiment exclu des études scientifiques pour le reste de sa vie. Cette rigidité du système français renforce l’idée qu’un seul choix est possible et qu’il est irréversible, contrairement à d’autres pays où les parcours sont plus flexibles et évolutifs.

Ainsi, les résultats scolaires prennent une place prépondérante dans Parcoursup, au détriment des appréciations des enseignants et du projet personnel de l’élève. Cette sélection par les notes contribue au sentiment que certaines portes se ferment trop rapidement.

Quelles alternatives possibles ?

Il est peu convaincant de préconiser, comme le font certains experts, d’adapter l’offre de formation uniquement aux besoins du marché. Comment décider quelles filières ouvrir ou fermer en fonction des fluctuations économiques ? De même, supprimer Parcoursup sans proposer une alternative viable ne résoudrait pas le problème de l’accès aux études supérieures.

Les solutions sont complexes et doivent être réfléchies de manière globale. Faut-il déconnecter la formation secondaire des besoins professionnels et privilégier un apprentissage sur le terrain ? Comment rendre plus attractifs les métiers en tension, souvent boudés par les jeunes ?

Avant tout, il est essentiel de construire un monde du travail moins inégalitaire, où l’accès à l’emploi ne repose pas uniquement sur le diplôme obtenu. Le développement d’une formation continue accessible à tous pourrait également permettre plus de souplesse dans les parcours professionnels.

Ce n’est qu’en offrant aux jeunes une véritable liberté de choix et des perspectives évolutives que l’orientation pourra cesser d’être une source de stress et devenir une opportunité d’épanouissement.

SOURCE : ALTERNATIVES ÉCONOMIQUES

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