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ÉDUCATION
11
April 2025

Signalement et justice : quels canaux et traitement ?

Une information fluide entre procureurs et rectorats

« Il y a une grande fluidité d’information entre les services du procureur et le rectorat » concernant les violences de personnels envers des élèves, déclare Anne Bisagni-Faure, rectrice de Lyon, lors de l’audition de quatre recteurs et deux Dasen par la commission d’enquête sur le contrôle des violences scolaires, le 9 avril 2024 à l’Assemblée nationale. Les recteurs soulignent aussi l’existence de canaux variés pour les signalements, le décalage entre le temps judiciaire et les délais de suspensions conservatoires, et les pratiques hétérogènes des académies concernant leur application.

Quatre recteurs et rectrices (Julie Benetti, Anne Bisagni-Faure, Hélène Insel et Guillaume Gellé), le directeur de l’académie de Paris (Laurent Noé) et deux Dasen (Jérôme Bourne Branchu et Catherine Moalic) ont été interrogés par la commission d’enquête parlementaire sur "les modalités du contrôle par l’État et de la prévention des violences dans les établissements scolaires" le 9 avril 2025, après l’audition de l’IGESR la veille.

L’audition a porté sur les canaux de signalement de violences par des personnels envers des élèves, la relation entre l’Éducation nationale et la Justice, ainsi que les pratiques en matière de mesures conservatoires, de sanctions disciplinaires et de suivi des personnels condamnés.

Une diversité des canaux de signalement des violences

« Par quels acteurs les signalements vous sont-ils remontés ? » demande la présidente de la commission des affaires culturelles et de la commission d’enquête, Fatiha Keloua Hachi (PS). Dans le secteur public, les recteurs indiquent que c’est l’application "Faits établissements" qui constitue le canal principal de signalement des violences de personnels envers les élèves, comme le confirment Anne Bisagni-Faure (rectrice de Lyon) ou Guillaume Gellé (recteur de la Guyane) pour leurs académies.

Ils mentionnent aussi des signalements "plus rares par des courriers d’alerte", "parfois par des courriels ou appels de personnels ou de parents". La rectrice de l’académie de Paris, Julie Benetti, signale également dans son académie "une procédure spécifique à travers les remontées d’infraction en milieu scolaire (RIMS) renseignées par les directeurs d’école ou les chefs d’établissement, dont l’intérêt est de favoriser le partage d’informations simultanées avec la police".

Concernant l’enseignement privé, Anne Bisagni-Faure indique que les rectorats sont informés par les directeurs diocésains, via les Dasen, et beaucoup plus rarement par l’application "Faits établissements". Hélène Insel, rectrice de l’académie de Rennes, confirme que "le signalement est plus difficile pour le privé" mais que "les Dasen et les directeurs diocésains sont dans l’échange sur ces sujets". Elle mentionne aussi que, dans son académie, "la presse permet de découvrir 2 % des faits".

Catherine Moalic, Dasen du Finistère, souligne que "les faits de violence de personnels sont davantage signalés par des courriers, des alertes du DDEC ou de la préfecture", tandis que l’application "Faits établissements" "fonctionne bien pour des faits de violences entre élèves". Jérôme Bourne Branchu, Dasen du Rhône, relève aussi une "diversité des canaux de signalements : courriers de parents, maires, une fédération de parents d’élèves".

Une relation fluide entre rectorats et justice malgré des délais différents

Autre sujet abordé lors de l’audition : le lien Éducation nationale-Justice. Les conventions passées entre les rectorats et la Justice, portant sur le partage d’informations entre les deux institutions, "semblent peu animées et peu pilotées", relève la co-rapporteure de la commission d’enquête, Violette Spillebout (EPR).

Anne Bisagni-Faure met en avant "une grande fluidité d’information entre les services du procureur et le rectorat s’il y a des professeurs mis en cause, pour mettre en œuvre une suspension à titre conservatoire". Cependant, elle insiste sur le fait que "ce qui pose question est le temps d’enquête, car les quatre mois maximum de suspension conservatoire ne correspondent pas forcément au temps judiciaire". En ce sens, la Dasen Catherine Moalic note aussi un décalage entre "le temps de la justice et de la suspension".

En Guyane, Guillaume Gellé fait également part d’une "synergie entre Justice et rectorat", tout comme le Dasen du Rhône, Jérôme Bourne Branchu, qui souligne les "échanges fluides avec la Justice". Mais il reconnaît que les conventions "ont plutôt investi les enjeux de protection des personnels et de harcèlement". Dans l’académie de Rennes, Hélène Insel rappelle "le lien du rectorat avec les procureurs" et "qu’il n’y a pas de problème d’échange sur les sujets très graves".

Pour entretenir la relation entre l’Éducation nationale et la Justice, le directeur de l’académie de Paris, Laurent Noé, rappelle la tenue "chaque année d’une réunion avec les chefs d’établissements pour repréciser cette convention" et "notre intention est d’y associer les chefs d’établissement du secteur privé", ajoute la rectrice Julie Benetti.

Cependant, Hélène Insel, rectrice de Rennes, souligne que "les pratiques en matière de mesures conservatoires diffèrent selon les académies". À titre personnel, elle indique "avoir fait passer le message que la mesure conservatoire n’est pas une sanction disciplinaire, et, qu’à ce titre, elle protège les élèves, mais aussi la personne accusée, pour qui il n’est pas confortable de travailler avec une telle accusation".

Suivi des personnels condamnés et réaffectés

Concernant le suivi des personnels condamnés pour violences, Julie Benetti indique que "la consultation du Fijait et de l’extrait de casier judiciaire permet de s’assurer qu’on ne recrute pas de contractuels ou de personnels stagiaires condamnés. Le dossier administratif suit les personnels, et on peut voir si une sanction y figure. Qu’il s’agisse d’un professeur du privé ou du public". "Nos services revérifient les dossiers des professeurs recrutés dans le privé", confirme Anne Bisagni-Faure.

Pour les personnels hors Éducation nationale du secteur privé, "nous pouvons venir en soutien des directions diocésaines pour s’assurer que cette vérification est faite", souligne la rectrice de Paris. Anne Bisagni-Faure partage également les pratiques de l’académie de Bordeaux lorsqu’elle en était rectrice, afin de combler "le manque d’expérience constaté des chefs d’établissements pour rédiger un article 40" : "Une formation en webinaire, organisée par le rectorat pour les personnels d’encadrement, ou l’IH2EF qui propose dans la formation initiale des personnels de direction un volet sur ce sujet". Le Dasen du Rhône mentionne deux initiatives de la Justice : "Une réunion des chefs d’établissement sur le nouveau code de justice pénale des mineurs par le parquet d’Évry, et la proposition d’un point d’information sur les procédures de signalement par la Cour d’appel de Lyon".

Les pratiques de mesures conservatoires diffèrent selon les académies

Concernant les mesures conservatoires et les sanctions disciplinaires mises en œuvre par les rectorats, Anne Bisagni-Faure indique que "dans le public, avant le lancement d’une procédure disciplinaire, il y a un échange avec la DGRH pour travailler sur la gradation de la sanction, ce qui n’est pas usuel pour les enseignants du privé sous contrat, car c’est à l’appréciation des services en charge de l’enseignement privé". À Paris, le rectorat "veille à ce que les mesures conservatoires puissent être prises très rapidement quand les faits remontés sont graves", précise Julie Benetti. Et les sanctions disciplinaires "sont décidées en fonction de la gravité des faits, après des échanges entre le service juridique, la DGRH et le secrétariat général".

SOURCE : AEFINFO

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