Sommet de l'intelligence artificielle : la France mise sur l'open source et bouscule le secteur

Face aux géants de l'intelligence artificielle comme OpenAI, Emmanuel Macron et plusieurs entreprises françaises soutiennent le développement d'IA ouvertes et accessibles à tous. Un choix qui permettrait de démocratiser les bénéfices liés à ces technologies, tout en soulevant de nouveaux défis.
Une annonce marquante du sommet sur l'IA
Lors du Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle, qui s'est tenu à Paris les 10 et 11 février, Emmanuel Macron a annoncé un investissement de 109 milliards d'euros, principalement privés, pour renforcer les infrastructures d'IA en France. Si cette annonce a suscité de nombreux débats, une autre décision, plus discrète, pourrait avoir un impact majeur : la création de "Current AI", un partenariat destiné à lever 2,5 milliards de dollars pour développer une IA d'intérêt général.
Cette initiative s'inscrit dans une politique de soutien à l’open source, qui a récemment secoué le marché, notamment avec l’arrivée de l’IA chinoise DeepSeek. Le principe ? Permettre à tous d’utiliser et de modifier librement les technologies d’IA, sans contrainte de licence ou de droits d’auteur. Mais pourquoi ce modèle séduit-il autant la France et ses acteurs de l’IA ? Quels en sont les avantages et les limites ?
Une IA ouverte pour un partage équitable des bénéfices
Le partage des connaissances est au cœur du développement de l’IA. En 2017, Google avait par exemple dévoilé l’architecture Transformer, déclenchant l’essor actuel du secteur. Des plateformes comme Hugging Face permettent aujourd’hui à des chercheurs et entreprises de mutualiser leurs travaux.
Cependant, certains acteurs comme OpenAI ont progressivement abandonné cette approche, estimant que leurs modèles devenaient trop puissants et nécessitaient un contrôle plus strict pour éviter des usages malveillants. Malgré cela, les partisans de l’open source considèrent qu’un accès libre aux avancées en IA est essentiel pour réduire la fracture numérique et éviter que seuls quelques géants ne bénéficient des progrès technologiques. En France, l’État encourage cette dynamique en facilitant l’accès au supercalculateur Jean-Zay pour les chercheurs et les entreprises.
Un levier pour stimuler la concurrence
Au-delà des considérations éthiques, l’open source représente aussi un enjeu économique majeur. En permettant aux entreprises d’accéder gratuitement à des modèles d’IA, ce modèle favorise la diversité du marché et empêche la concentration des technologies entre les mains de quelques géants.
"L’ouverture est une bonne stratégie pour les challengers", explique Gaël Varoquaux, chercheur à l’Inria et concepteur du logiciel open source scikit-learn. En facilitant l’accès aux architectures et aux jeux de données, "Current AI" vise à encourager l’émergence d’acteurs alternatifs capables de proposer des solutions innovantes.
Une transparence renforcée mais à quel prix ?
L’open source est également perçu comme un levier pour améliorer la transparence des IA, notamment en matière d’éthique et de biais algorithmiques. "Partager la recherche en IA permet d’accélérer son développement et sa mise en application dans les entreprises", affirme Florian Douetteau, PDG de Dataiku.
Toutefois, certains experts alertent sur un phénomène d’"open washing", où certaines entreprises revendiquent une ouverture sans réellement dévoiler les données d’entraînement de leurs modèles. Or, la qualité et l’origine de ces données influencent fortement les résultats des IA.
Des risques de détournements et d’impact environnemental
L’accès libre aux technologies d’IA pose également des questions de sécurité. "Une IA open source peut être modifiée pour contourner des garde-fous", prévient David Evan Harris, expert en régulation numérique. Il souligne le risque de voir ces modèles utilisés à des fins malveillantes, comme la création de fausses informations ou de deepfakes non consentis.
Un autre défi concerne l’empreinte écologique de ces technologies. L’open source accélère la diffusion de l’IA, augmentant potentiellement sa consommation énergétique globale. Certains experts s’inquiètent aussi du développement incontrôlé d’IA de plus en plus puissantes, pouvant à terme poser des risques sociétaux majeurs.
Un équilibre à trouver entre ouverture et régulation
L’open source représente-t-il une opportunité ou une menace ? "Tout dépend des cas", estime Stella Biderman, directrice exécutive d’Eleuther AI. Si ce modèle favorise l’innovation et la concurrence, il nécessite aussi un cadre réglementaire adapté pour éviter les dérives.
La France, en promouvant un accès libre aux avancées en IA tout en incitant à une gouvernance responsable, tente d’établir un équilibre entre progrès technologique et contrôle des risques. Une approche qui, si elle est bien encadrée, pourrait redéfinir les règles du jeu dans le secteur de l’intelligence artificielle.

SOURCE : FRANCE INFO

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